Sarosa
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 Vicky

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Exorciste

Exorciste


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MessageSujet: Vicky   Vicky Icon_minitime1Mer 15 Déc - 3:29

Au départ, ces textes n'étaient pas du tout destinés à devenir ce qu'ils sont aujourd'hui. Il n'y avait "que" le second post, sans aucun rapport avec SO. Bref, plutôt écrit pour moi quoi. Après quoi je suis revenu à SO, après presque un an d'absence, dont un bon mois passé à chercher un prétexte cohérent pour justifier mon absence. M'est venu alors l'idée d'adapter ce texte, en brodant un peu avant qui, à ma grande surprise, a plu. Au fur et à mesure que le temps passait, j'ai continué à écrire, plus pour moi que pour SO, mais je restais dans l'univers de Slayers, alors ça a finalement été publié sur des coups de têtes. Au final, c'est devenu un prétexte pour développer "l'aspect refoulé" d'Exo, tout ce que je peux pas me permettre, par cohérence avec lui, de faire IG, en public. Il n'y véritablement que les deux dernières parties qui sont écrites "pour Exo". Sur ce, le texte ^^ Sans véritable mise en forme "forum rp" parce que bon, bout à bout doit bien y avoir 50 pages et j'ai la flemme de me taper toutes les balises. Un post: Un texte. Bon courage. study

(A Missy.)

Journal de chasse, (23 Grimstel).

Ils avaient raison, je perds la mémoire…et peut être la tête toute entière. Cela va bientôt faire 1 an que je n’ai plus eut un seul client, je me suis isolé plus que jamais. J’ai puisé dans toute mes économies, et parfois dans celles des autres, mais maintenant je n’ai plus rien. Je n’ai pas osé toucher ma dernière bouteille, mais pourtant, je sens que je ne vais pas tarder à le faire…je n’ai pas soif, mais j’en ai besoin, un peu comme un vampire a besoin de sang. Je vois venir une impasse : Je n’ai plus d’argent, mais je ne peux pas reprendre de clients…pas après l’incident. Voler des bourses devient de plus en plus dur, la milice fait bien son travail. Je me sens faible et piégé. Maintenant je suis épuisé, j’ai vieilli avant l’heure.

Journal de chasse (24 Grimstel)

Une fois de plus, je n’ai pas dormit. Je n’ai plus d’alcool, les fantômes du passé sont là, tout autour. Je sens le regard des centaines d’âmes que j’ai emporté, moi et les autres. J’entend les pleurs des enfants, les cris des femmes et l’agonie des hommes. Je sens leur sang couler sur mes mains, je revois les corps allongés dans les grandes étendues. Au final, ce qui me perturbe ce n’est pas ce que j’ai fait…mais la facilité avec laquelle je les ai faites. Anéantir des vies, en briser d’autres, anéantir l’innocence. Et pour quoi ? A peine de quoi payer quelques tournées. Combien de fois ai-je retenu un sourire, de plaisir brutal, en voyant mes carreaux se ficher dans mes victimes. Je me suis délecté de leurs supplications, j’étais tombé amoureux de la souffrance des autres. Je ne tuais plus, je torturais, jouais, et achevais, déçu d’en avoir déjà terminé.

Journal de chasse (25 Grimstel)

Je me suis assoupit, malgré les regards. J’ai revu…revu l’enfant que j’avais scalpé. Dont j’avais brisé le crâne pour en répandre le contenu sur son père, assoupit. J’ai revu l’horreur à l’état pur, dans ses yeux. J’ai revu sa femme enceinte, dont j’avais ouvert le ventre rebondit pour y répandre de l’alcool auquel j’avais mit le feu. C’est au moment ou j’achevais le père, fondant en larmes et se débattant comme un forcené, que je me suis réveillé. Une sueur glacée dans mon dos, sur mon visage. Et dans l’obscurité, plus que jamais, je sens le regard des âmes. Je leur ordonne de partir, de me laisser. Ils rient, rient de me voir les implorer, de me voir désespéré, de me voir me préparer à mourir. J’ai voulu les tuer, fendant l’air de mes poings, tirant sur les murs. Ils ont rit de plus belle. Ils me suivent, ou que j’aille. J’ai consulté des hommes d’église, d’autres exorcistes. Tous parlent de remords, de rédemption. J’ai finit mes vivres, je sens mon corps m’ordonner de boire, et mon âme de fuir le passé.

Journal de chasse (27 Grimstel)

Je tremble. Il m’est presque impossible d’écrire. Je suis amaigri, affaibli, tremblant et affamé. Je passe mes journées, recroquevillés sur moi même, dans un coin de ma demeure. Je n’ai plus rien. La raison me supplie de reprendre un client. Un banal exorcisme me donnerait de quoi racheter des bouteilles, et ainsi de suite, et de fil en aiguille rejoindre ma vie d’antan. Tout aurait été tellement plus simple, si je n’avais pas commit cette erreur…D’ailleurs, Elle est présente, parmi les fantômes. C’est Elle qui rit le plus fort. Je l’entends dans ma tête. « C’est ta faute, c’est ta faute. » Je ne suis pourtant pas fou, mais est-ce qu’un fou sait qu’il l’est ? …Je suis peut être fou…

Journal de chasse (28 Grimstel)

Je sens le besoin de confesser mon ultime crime, de raconter mon erreur, pour pouvoir la lire, l’analyser…peut être même y remédier. Je veux le faire car je n’ai plus beaucoup de temps. Mes lèvres sont craquelées par la sècheresse et ma gorge me fait un mal de chien, je m’évanouis régulièrement, par manque de nourriture, sans compter les spasmes que cause le manque d’alcool. Et bien évidemment, les fantômes rient toujours. Aussi, voilà dans ces quelques lignes ce qui aura définitivement ternit ma vie.

Une rencontre. Malheureuse et ordinaire, comme tant d’autres. Une femme, belle il faut le reconnaître. Petit à petit, à force d’essayer de la mettre dans mon lit, Elle deviendra mon apprentie, et en parallèle ma compagne. Je me suis attaché, et comme chaque fois que je le fais, ça a mal tourné. Pourtant je faisais attention, pas d’exercices dangereux, pas de missions à risques. Mais nous étions trop proches. J’ai eut l’impression d’avoir oublié de lui dire et de faire ce que j’aurais dut. Les « Je t’aime » main dans la main, les étreintes chaleureuses, les baisers passionnés. Puis, même erreur, la deuxième, qu’avec mes parents : Croire que la vengeance la ferait revenir. J’ai dépensé près de 10'000 pièces pour retrouver le brigand. Il a été torturé à mort, il pensait m’anéantir dans le chagrin, alors que je m’étais jeté dans la haine.

Il a hurlé, pendant 27 heures d’affilée je l’ai fait crier. Coupant un orteil par ci, retirant la peau d’un membre par là. Finalement, il est mort noyé dans son propre sang. Mais j'ai continué. Puis j’ai payé des obsèques digne d’une reine à ma regrettée. Je me suis coupé de tout contact humain, troisième et dernière erreur, j’ai fait livrer des vivres et de l’alcool à ma demeure, je passais mes journées devant sa tombe. Contemplant tout ce que j’avais perdu, une fois de plus. De temps à autre je me rendais à une ancienne planque, pour récupérer de l’or afin de payer les livraisons et des fleurs pour le monument funéraire, dernière trace physique de son existence.


J’ai longtemps songé à en finir, placé la lame sur ma gorge, hésiter des dizaines de minutes pour finalement la reposer et ouvrir une nouvelle bouteille. Puis un jour, me rendant au cimetière, j’ai croisé un couple. Banal, souriant. Je me suis emporté, je pense que c’est à ce moment que j’ai prouvé que j’étais devenu fou, et je me suis précipité sur eux. Jaloux, haineux, désespéré et sûrement un peu soul. J’ai frappé l’homme. Pourquoi pouvait-il avoir la compagnie de sa femme et pas moi ? Au nom de quoi ? Je lui ai mit le visage en sang, à l’aide d’une pierre. J’ai continué à frapper jusqu’à entendre l’os se briser sous la peau écorchée. Sa compagne paniqué essayait de me stopper, mais je l’ai assommée et l’ait battue à mort, également. J’ai caché les deux corps, je ne sais pas si quelqu’un les a retrouvé, si des enfants les ont regrettés, je m’en fiche. Mais je n’ai jamais osé retourner à la tombe. J’avais, et j’ai toujours, honte. J’ai massacré des innocents, exactement comme le bandit l'a fait avec Elle…pire, je n’y ait rien gagné.

Journal de chasse (29 Grimstel).

Aidez moi. Faites les taire, faites moi boire, nourrissez moi, ramenez la moi. Tant de mots que je répète dans le vide. Personne ne m’entend, personne ne s’en soucie…Personne ne voudrait sauver l’ordure que je suis. Personne sauf Elle, mais elle rit. Elle rit, encore et encore. Et ça résonne, dans ma tête, dans ma demeure. Je voudrais pouvoir m’arracher les oreilles, mais je n’ai plus assez de force…et je sais que les voix seront toujours là, dans ma tête… Au secours.

***


Je flotte, je ne sais pas dans quoi. C’est chaud, immatériel… tout est noir autour. Puis, petit à petit, des lumières…les fantômes. Un gamin, une femme, un vieillard, d’autres, encore et encore. Tous se rapprochent, m’encerclent. Comme un seul homme, ils s’arrêtent. Seul une silhouette s’avance face à moi. Elle. Son regard me transperce, je sens la haine, la déception, la tristesse dans son regard. Sa voix fait bourdonner mes oreilles.

- Pourquoi ? Pourquoi n’avoir rien fait ? Tu savais que ça allait arriver. Tu n’étais pas avec moi, tu m’as laissé mourir, pourquoi ?
- C’est faux ! Je…
- Tu n’étais pas là. Pourquoi ?
- Même si …
- Non, si tu étais resté avec moi, il n’aurait rien put faire.
- Comment j’aurais…
- Put savoir ? Ne fais pas semblant d’ignorer ton propre passé. Les ennuis te collent à la peau, seul tes…horribles talents te sauvent ce qu’il te reste de vie.
- Mais je…
- Tu m’aimes, je dois te pardonner, c’est ça ? Bien sûr, après tout je n’ai perdu que la vie. Une vie ce n’est rien, pour toi, misérable tueur.
- Ce n’est pas…
- Ce que je crois ? Je ne crois rien, je suis sûr. Tu es un lâche, tu l’as toujours été. Tu as fuit tes problèmes dans la violence, l’alcool, puis la solitude. Tu cherchais des portes de sortie là ou tu voulais bien en voir pour arranger ce qu’il te reste de conscience. Tu ne vaux pas mieux que n’importe quelle ordure.
- Mais…
- Inutile de te justifier, le seul que tu pourrais encore convaincre, c’est toi.

Constantine aurait voulu frapper, mais cela ne changerait rien…surtout envers un fantôme. Une illusion de son esprit sans aucun doute malade. Et même s’il savait que rien n’était réel, que c’était un rêve, un délire peut être…Il ne voulait pas lui faire de mal, pas à Elle. Petit à petit, tout devint flou et il se réveilla.


Dernière édition par Exorciste le Mer 15 Déc - 16:10, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Vicky   Vicky Icon_minitime1Mer 15 Déc - 3:31

« On ne peut désirer ce que l’on a jamais connu ».

Cette phrase, Constantine l’avait entendu encore et encore, et ne l’avait jamais comprise : Un pauvre n’a jamais connu la richesse, mais la désire, un orphelin n’a jamais connu ses parents, mais le désire, certains hommes n’ont jamais connu la mort mais la désire. Et c’était aujourd’hui, alors qu’il luttait contre le verglas qui recouvrait les pavés pour ne pas tomber, qu’il avait compris. Le temps était maussade. Gris, sans soleil mais néanmoins clair, froid mais pas glacial. Il ne manquait plus qu’une fine pluie à la place du verglas. Devant lui, une personne venait de chuter, lâchant ses achats effectués dans la matinée. Un peu de viande, du pain déjà presque rassis et quelques fruits sommaires. Dont une pomme, qui avait roulé jusqu’aux pieds de l’exorciste. Ce dernier la ramassa, sans un regard pour son propriétaire et croqua à pleine dents. Le fruit était bon, ce qui était étrange, pour une telle saison. Alors qu’il allait reprendre une bouchée, un lourd gant s’abattit sur son bras. Constantine soupira, et récita, d’une voix presque mécanique, tout en relevant la tête.

- Ecoute mon gars, laisse moi finir mon…

Il se tut. Même sa bouche d’ordinaire aussi droite que si elle avait été cousue était restée grandement ouverte. S’en rendant compte, il la referma après quelques secondes sans quitter des yeux la jeune femme qu’il avait devant lui. Elle avait des longs cheveux noirs, des yeux noirs profond dans lesquels il voyait son reflet, de fines lèvres légèrement roses, le teint pale. Elle était relativement petite, mais il se sentait néanmoins minuscule devant elle. Vêtue de noir et de rouge, une mèche cachant son œil droit, elle le fixait, silencieuse, la main tendue, à présent, dans l’autre elle tenait un petit couteau. Constantine envisagea rapidement de ne pas lui rendre sa pomme, malgré le fait qu’il était plus grand, plus fort et qu’il n’avait jamais rendu quelque chose qu’il avait pris, il déposa la pomme dans la main de la femme, mais ne la lâcha que quelques secondes après.

- Vous disiez ?

Sa voix était envoutante, presque une mélodie tant elle était harmonieuse. A la fois puissante et délicate, polie mais sèche. Sans attendre la réponse, et d’un coup agile, elle coupa la pomme en deux et rendit la moitié croquée à Constantine.

- Qu’est ce qui vous fait croire que je me contente d’une moitié de pomme ?
- Qu’est ce qui vous fait croire que je me soucie de ce qui vous contente ?

Il avait voulu jouer les durs, pas parce qu’il voulait une pomme complète, juste histoire de répondre quelque chose. Elle avait répondu de manière naturelle, du tac au tac. Le prenant de cours, c’était rare que les gens répondent, encore moins quand ils étaient seuls et moins bien bâtis que lui. Et pourtant, elle semblait ne pas avoir conscience de ce qu’elle faisait, ou alors elle s’en fichait : Exactement comme lui.

- Je pourrais très bien vous tranchez la gorge et prendre votre nourriture.
- Pourquoi ?
- Parce que je me fiche de ce qui vous arrivera ensuite, je me soucie de moi, le reste du monde peut brûler, tant que j’aurais à boire, ça ne changera pas mon quotidien.
- Ah oui, effectivement, vous auriez put.
- Je le peux encore.
- Et bien, allez y.
Cette dernière phrase avait été lancée sur un ton de défi, sans aucune agressivité, juste une légère provocation, comme une taquinerie entre amis. Ne voulant pas perdre la face, Constantine dégaina son glaive et posa la pointe sous le menton de la jeune fille qui n’avait pas bougé. Il hésita plusieurs secondes qui lui parurent des heures, conscient que plus il attendait, plus il avait l’air idiot, et que ce serait encore pire s’il rengainait. Il appuya légèrement, pour la forme, et rangea son arme.

- Et bien ?
- J’vous aime bien.
- Et alors ?
- Alors je ne tue pas les gens que j’aime bien, sauf quand ils me doivent quelque chose et qu’ils ne veulent pas payer leurs dettes. Ou quand j’ai besoin de leur mort.
- Je vous dois une demi-pomme.
- Je l’ai trouvée très mauvaise, en fait.
- Ah, bien sûr.

Elle n’était pas convaincue, et le montrait ouvertement par un léger sourire en coin. Elle croqua dans sa propre moitié, avant d’ajouter.

- Et bien moi, je la trouve délicieuse, alors si vous n’en voulez pas.

Et elle reprit la moitié de la main de Constantine, sans spécialement se hâter. Puis elle rangea les restes de la pomme et son couteau dans le sac de toile.

- Alors, vous êtes quoi ? Un dangereux voleur de pommes ? Un vendeur d’armes ambulant sans le sou ? Un milicien qui abuse de son autorité ?
- Respectivement : Prêtre, chasseur de primes, milicien et exorciste. A chaque fois renvoyé. Les temples n’aiment pas mes méthodes, la milice n’aime pas les alcooliques et la guilde de chasseur de primes a mit une somme sur ma tête, pour que je parte.
- Et bien, votre famille doit être fière de vous : Un alcoolique violent et recherché.
- Je crois que là ou elle est, elle n’en a strictement rien à faire.
- Partit sans le rebus de la famille ?
- En quelque sorte : Ils sont morts.
- Désolée.

Elle semblait enfin avoir perdu de son assurance, juste quelques secondes, mais Constantine ne voulait plus l’épater.

- Vous les connaissiez ?
- Euh…non.
- Alors je ne vois vraiment pas en quoi vous êtes désolée.
- C’est une formule de circonstances, comme quand on dit félicitations après un mariage arrangé entre un bandit avec des relations et une jeune fille pleine d’or.
- Je vois.

Il resta silencieux encore quelques minutes. Elle n’était plus aussi sûre d’elle qu’avant, elle semblait presque triste.

- C’est une tête de circonstance ?
- Non, mon père aussi est mort, et je me dis que sans ma mère, ça aurait été dur, non ?
- Je pense que les pillards avaient d’autres préoccupations que mes sentiments.
- Ca ne répond pas à la question.
- D’après les prêtres qui m’ont élevés : Je suis dénué de tous sentiments positifs et de toute forme d’empathie, je suis devenu un alcoolique dévoré par la haine et j’ai aussi des pulsions, genre des surplus de violences.
- Et d’après vous ?
- Ca m’a rendu moins vulnérable, moins clément et je rends les patrons de bar heureux.

A nouveau, elle esquisse un vague sourire. Le genre de sourire pour lequel il serait prêt à tuer le roi. Un sourire qui lui donne envie de faire de même. Une indescriptible sensation de bien être. Pas vraiment de la joie ou du bonheur, mais quelque chose d’assez proche.

- Ca vous fait rire, ma vie « de pauvre orphelin opprimé » ?
- Non, pas du tout. C’est la façon dont vous en parlez, comme si c’était un sujet de plaisanterie, comme si ce n’était pas à vous que ça était arrivé.
- Je vois. Bon, vous m’excuserez mais je n’étais pas là uniquement pour ramasser votre pomme lorsque vous tomberez.

Il ne veut pas vraiment partir, même pas du tout, mais il sent qu’il ne va pas tarder à avoir froid. Et il aurait l’air idiot, à trembler. Il tourne rapidement les talons tandis qu’elle lui répond.

- Il se pourrait que j’aie besoin d’un exorciste, d’ici peu. Ou est ce que je peux vous trouvez ?
- A l’auberge des fées, deux rues plus loin.
- Vous y résidez ?
- Non, je ne rentre chez moi que pour travailler ou dormir.
- Et vous habitez ou ?
- Hm, je travaille dans la forêt, dans une cabane, près de Sarosa. Et je dors parfois à l’auberge, parfois chez une…amie. Parfois ailleurs.

Sans un mot de plus, il part rapidement sentant le regard de la femme derrière lui, jusqu’au coin de la rue. Il parcourt rapidement les derniers mètres, repensant à ce qu’il vient de vivre. Il entre, commande son habituel verre de Whisky mais au lieu de le boire, il l’observe. Il n’a plus soif. Et la fille, son parfum de menthe, sa voix douce, sa beauté, son comportement insouciant. Tout ça et plus encore lui tourne dans la tête, sans fin. Pour la première fois depuis bientôt 20 ans, il désirerait être aimé. Puis, se rendant compte qu’il divague, il se remet à boire, pour ne plus penser.



Vicky observe l’exorciste ne devenir plus qu’une silhouette, au fond de la rue, puis disparaître. Elle hésite à lui courir après, puis se dit qu’elle aura déjà assez de mal à trouver un possédé pour avoir une bonne raison de revoir l’inconnu, et reprend la route jusqu’à chez elle, faisant attention à ne pas glisser. Son esprit vagabondant sur tout ce qu’elle pourrait dire et faire, lors de leur prochaine rencontre…




Vicky entre dans l’auberge. La chaleur et l’odeur de sueur et d’alcool lui sautent au visage presque immédiatement, tandis qu’elle referme la porte d’un coup de pied. Elle parcourt le comptoir du visage, aucun signe de Lui. Puis les tables. Il n’est pas là. Elle soupire, hésite à aller fouiller la forêt, puis se dit qu’elle ferait mieux d’informer le patron de ses intentions. A peine accoudée au comptoir, le tavernier l’interpelle.

- Qu’est ce que ce sera pour vous ?
- N’importe quoi, du lait, si possible. Et des informations.
- Je peux vous refiler un tuyau infaillible sur la course de dem…
- Non, non. Sur un de vos clients. Un exorciste, cheveux blancs, cape rouge, l’air hautain et froid.
- Ah oui. Un habitué. Vous devez être la femme des pommes.
- Pardon ?
- Il a parlé de vous, entre son 15ème et son 16ème verre.
- Ah, et qu’a-t-il dit ?
- Que vous étiez mieux roulée que la meilleur des catins de Trigorn, et que si vous aviez eut moins de répartie, il vous aurait mise dans son lit.

Vicky sent la colère lui monter aux joues. Etre comparée à une catin ? Pour qui se prenait-il ?

- Et bien vous direz à cet alcoolique notoire que…
- Oh oui, moi aussi je le déteste.

La voix vient de son dos, une voix sèche et glaciale, avec une pointe d’amusement ironique. Le tavernier sert le lait et retourne à ses verres, l’air gêné. Sans se retourner, elle comprend, grandement aidée par l’odeur de Whisky fermenté, que c’est Lui, dans son dos.

- Vous auriez put venir me parler en salle, vous savez, inutile de martyriser ce pauvre Paul.
- Mais, vous n’étiez pas en salle !

Constantine désigne du menton le coin de l’établissement ou, à coté de la chaudière, quelques bouteilles vides trainent. Puis, il en revient à Vicky.

- Alors, que voulez-vous me dire ?
- Que… que vous pouviez toujours courir pour me voir dans votre lit. Pour qui vous me prenez ? Et aussi pour le problème d’exorcisme, dont je vous avais parlé.

Il acquiesce en silence, sans un mot d’excuse ni même une expression gênée sur le visage. Le visage impassible, le regard distant et froid. Il semble nettement plus assuré qu’il y a deux jours, dans la rue. D’un geste de la main, il lui demande de passer devant. Elle boit son verre de lait d’une traite, le paie, puis quitte l’établissement, l’exorciste sur ses talons. Le temps n’est toujours pas à sa convenance. Vivement une bonne pluie. Elle zigzague dans les rues, jusqu’à sa demeure, une maison de trois pièces peu meublée. Elle se retourne pour indiquer à son futur employé qu’ils sont arrivés, et s’aperçoit que son regard est rivé sur ses fesses.

- Ca va, je vous dérange pas trop ?
- Je vous préférais largement de dos, à vrai dire.
- C’est ici, entrez et faites votre boulot.

Tandis qu’il disparaît dans le bâtiment, Vicky sent l’angoisse monter. Elle a pris un type qui délirait, dans la rue. Un idiot de village. Elle se demande quel va être la réaction de l’alcoolique. Sûrement pas celle qu’elle espère, au plus profond d’elle-même. Le claquement de la porte, la fait sursauter. Constantine sort, la dévisage un bref instant puis tend la main.

- 100 pièces, pour le dérangement inutile. Je fais pas les tarés.
- Quoi ? Mais c’est de l’escroquerie !
- C’est les prix, si vous n’avez pas les moyens je me servirais dans votre mobilier.

Folle de rage, elle lui jette une petite bourse au visage. Non seulement elle a passé sa nuit à chercher ce type pour rien, mais en plus il n’a même pas pensé qu’elle avait fait ça pour le revoir. Elle rentre, jette littéralement le pauvre innocent dehors, puis claque la porte. Partagée entre colère et tristesse, elle s’assoit dans son lit et attend. Attend de trouver une solution, attend qu’il frappe à la porte comme dans ses espoirs les plus fous, attend qu’il disparaisse de son esprit.


De son côté, Constantine s’assois sur un banc de pierre, en face de la maison de Vicky. Il a compris tout de suite, qu’elle voulait simplement pouvoir lui reparler. Et à vrai dire, il en était content. Mais pour regagner un peu d’éclat, suite à leur rencontre dans la rue, il ne s’était pas laissé prendre. Il se surprit à sourire en repensant à Elle, puis il prit sa flasque et se mit à boire, attendant qu’elle ressorte pour lui crier quelque chose au visage.


Vicky ne tient plus en place, elle a besoin de prendre l’air. Elle enfile un manteau et ouvre sa porte, se heurtant à Constantine, debout, le poing levé prêt à toquer à la porte. Elle reste silencieuse et immobile, sur le coup de la surprise, puis décide de lui montrer qu’elle ne va pas se laisser faire.

- Encore vous ?
- Oui, je vous ai économisé de glisser sur les pavés en vous attendant juste devant votre porte.
- Très drôle. Qu’est ce que vous me voulez, encore ? Me mettre dans votre lit et me faire payer après ?
- Et bien, il manque une dizaine de pièces. Donc soit vous me réglez en nature, soit vous me laissez venir prendre une bouteille.
- Aucun des deux, je vais aller vous payer deux verres de lait au pub, ça remboursera ma dette.
- Du lait ?
- Oui, ça vous évitera de débiter des âneries.

Elle lui passe devant, pour pas qu’il ne voie son sourire. Il allait frapper à sa porte. Et pas pour les pièces, il y en avait 100, elle en était certaine. Elle se sentait légère et heureuse. Et elle ne put retenir un léger éclat de rire, en entendant Constantine ronchonner quelques insultes en lui emboitant le pas.


Constantine acheva de nettoyer la lame de son glaive avec un vieux torchon, puis rengaina et jeta le fourreau à quelques centimètres de lui. Il était assis, dos à un tronc d’arbre dont l’ombre lui procurait un léger soulagement. Il faisait beau, et Constantine détestait ça. Vicky aussi, et, agenouillé près de lui, elle profitait également de l’ombre de l’arbre. L’exorciste appréciait sa présence. Elle était rafraichissante. Un rayon de lumière dans les ténèbres quotidiennes. Cela faisait une vingtaine de jours qu’elle était devenue son assistante. Malgré toute sa réticence, il n’avait sut dire non.

- Tu vas me faire croire que tu as tué un des hommes les plus dangereux de Trigorn sans le savoir ?
- Mais c’est la stricte vérité.

Elle affichait ouvertement son sourire, depuis peu. Elle souriait tout le temps, pratiquement, sauf quand elle n’avait plus besoin d’être à son service. De son côté, il s’était rendu compte qu’il avait progressivement abandonné le ton glacial auquel il était tant accoutumé. Cela l’avait surpris, au début, mais il s’y était fait.

- C’était un espèce de taré démoniaque qui avait tué quelques types dans la ville, toujours dans un bain de sang. Il a essayé de s’en prendre à moi, une fois et je l’ai tué. C’est une patrouille qui m’a avertit qu’il y avait récompense.
- Toi, Constantine, l’homme qui n’aime que lui, tu as aidé la ville sans savoir qu’il y avait une récompense ?
- J’ai sauvé mes miches, c’est tout.

Il aurait put mentir, prétendre être un protecteur de la veuve et de l’orphelin qui ne vit que pour le bien et la justice. Mais il avait la vague impression qu’elle n’aimait pas les héros typiques. Depuis le début de la journée, il lui racontait ce qu’il avait fait, au long des années. Il aurait trouvé ça barbant, à sa place. Mais pas elle. Comme si des histoires de combat égoïste pouvait l’intéresser, sincèrement.

- Et ta femme ?
- Ma femme ?
- Sasha.
- Ce n’est plus ma femme, et, en fait, elle ne l’a sûrement jamais été.
- Parle-moi d’elle.

Constantine hésita. Il n’aimait pas parler de Sasha, les gens se mettaient à le haïr lorsqu’il le faisait. Car elle avait été aimante et attentionnée, tandis que lui n’avait jamais songé, ne serait-ce qu’une fois, à leur couple. Il était soul, le jour du mariage, et n’avait jamais considéré Sasha comme autre chose que la sœur de son ancienne apprentie. Pourtant, il répondit quand même à la question.

- C’était une ange, naïve, innocente, attentionnée, amoureuse. J’étais plus ou moins forcé de la fréquenter, sa sœur était également une ivrogne et allait devenir mon apprentie. Je ne me suis jamais rendu compte de ses sentiments, et elle m’a marié alors que j’étais ivre mort. S’en est suivit une relation difficile. On enchainait dispute sur dispute, ou alors on ne se voyait pas. J’ai failli la tuer, à plusieurs reprises. Finalement, j’ai divorcé, et le lui ai annoncé. Folle de rage, elle et sa sœur m’ont en voulu pendant des mois et des mois, puis je ne les ai plus revues.
- Ah, et tu ne l’aimais pas du tout ?
- Ca fait partie des choses que j’ai perdues en même temps que mes parents.
- Et tu n’as jamais cherché quelqu’un ?
- Pourquoi faire ? Je suis aussi doué en sentiments qu’une vache en diplomatie. Je bois pour plus que je ne gagne et je passe mes journées à travailler. Même si je le pouvais, aucune femme ne voudrait de ça.
- Vu comme ça.

Son ton était trop neutre pour être naturel. Comme si elle n’était pas convaincue, mais il ne le releva pas.

- Tu… tu as essayé de la tuer ?
- Ouais. Du temps où j’étais milicien je l’ai même fait enfermer une semaine au trou. Le temps que je puisse divorcer.

Un nouveau silence. Il y avait de quoi, il venait de lui dire qu’il avait voulu tuer une femme juste parce qu’elle était amoureuse de lui. Il avait eut tort de parler de Sasha, ça allait encore lui porter préjudice. Pour changer de sujet, il retourna la question.

- Et toi alors, personne normale dotée de sentiments, combien de maris tu t’es trainé ?
- Je n’ai jamais été mariée, j’ai fréquenté des types rencontrés à droite à gauche, mais aucun n’était vraiment parfait.
- Ca doit être chiant.
- Quoi ?
- Passer des plombes à trainer quelqu’un pour se rendre compte que finalement, c’est qu’un type comme un autre.

Son visage se fendit à nouveau d’un sourire.

- C’est pas exactement comme ça que ça se passe. Disons qu’on passe de bons moments, et qu’on se rend compte que finalement, ça aurait dut rester un ami.
- Je vois.

Non il ne voyait pas, il n’avait même aucune idée de ce qu’il était censé voir. Mais il avait sentit qu’il devait dire quelque chose. Après quelques secondes, il ajouta.

- Je n’ai jamais eut de « Bons moments » avec Sasha.
- Alors ce n’était vraiment pas la bonne.

Constantine acquiesça en silence, et but un peu de sa flasque. Sous le regard surpris de Vicky.

- Tu ne crois pas que t’as assez but pour la journée ? Tu as pris une dizaine de verres au bar, et c’est la cinquième fois que tu termines ta flasque…On est qu’au milieu de l’après midi.
- Et alors ?
- Et alors si tu buvais un peu moins, tu serais peut être plus efficace dans ton boulot.
- Ca empêche de trop réfléchir, de se rendre compte qu’on risque de crever en allant balancer des prières à la tronche d’un démon deux fois plus grand que soit. Ca empêche de mémoriser, et de se rappeler.
- Ca te ruine la santé, surtout.

Et sans plus de discussions, elle lui arrache la flasque des mains et la glisse dans son sac duquel elle extirpe une petite bouteille d’eau, prise à la rivière. Constantine jauge la fiole du regard, pas d’odeur, pas de couleur. C’est juste froid. Face à l’insistance de Vicky, il en boit une gorgée. L’eau le rafraichit, deux fois plus que l’alcool. Il n’y a pas de gout, c’est comme ne rien boire, les effets néfastes en moins. Il rebouche la bouteille.

- Et si tu arrives à ne plus boire autre chose que de l’eau pendant deux mois…
- Quoi ? J’aurais un sucre et une tape derrière la tête ? Tu crois vraiment que c’est avec des promesses qu’on empêche un type de boire ?
- Très bien, dans ce cas je suppose qu’il est inutile de te dire ce que tu auras.
- Je préfère, puisque je ne l’aurais jamais.

Le ton n’était même pas monté, comme si c’était normal. En s’en rendant compte, il eut de nouveau envie de sourire, sans pour autant y arriver. Une vague grimace tout au plus.

- Bon, je n’étais pas censée apprendre à devenir Exorciste ?
- Oui, effectivement. Mais tu voulais des exemples concrets, après t’as voulu que je parle de Sasha…
- Oui, je sais, je sais. C’est ma faute, comme d’habitude. Alors, ces explications ?

Constantine comprit qu’elle était vexée qu’il ne veuille pas cesser de boire, ni même essayer.

- Qu’est ce que ça peut te foutre, que je boive du Whisky ou de l’eau ?
- Ca change ton espérance de vie, et de survie, aussi.
- Et alors ? En un an t’auras de quoi apprendre seul.
- Tu n’as pas pensé qu’après avoir appris je pourrais continuer à vouloir parler avec toi, ou te demander des informations…ou éventuellement faire équipe.
- Non, je n’y avais pas pensé.
- Alors ?
- Alors je bosse en solo.
- Je vois.
- Mais je pourrais faire une exception pour une ancienne élève.
- Alors c’est d’accord.
- Mouais, mais la formation te coutera le double.
- D’accord.

Un court silence de surprise, pour Constantine, de satisfaction, pour Vicky.

- J’aurais quoi, dans deux mois ?
- Tu verras bien, puisque tu n’as pas voulu savoir.

Il voulut objecter quelque chose, mais s’y renonça. Elle était aussi têtue que lui, et surtout, il sentait qu’il aurait beaucoup de mal à tenir deux mois sans Whisky.



Vicky sortit de chez elle, fermant consciencieusement la porte. Avoir une rencontre de nuit avec Constantine, professionnelle, certes, mais une rencontre quand même. Et faire des heures supplémentaires n’était pas du genre de son mentor. Elle était très fière de lui : Il n’avait pas but une goutte d’alcool ces 3 derniers jours, et sans même ronchonner une seule fois. Elle frissonna de plaisir en repensant à son sourire. Le seul qu’elle avait vu sur son visage depuis leur rencontre. Pour rejoindre Constantine, elle devait passer sur les docks. Elle pressa le pas en passant devant trois marins qui la sifflèrent. L’un d’entre eux l’appela, puis lui courut après, suivit de ses deux amis. Le premier l’attrapa fermement par l’épaule et la fit se tourner. Elle lui décocha un fulgurant coup de genou dans l’entrejambe. Le marin lâcha sa proie et tomba à genoux. Un deuxième coup le cueillit à la mâchoire et le fit tomber sur le dos. Le deuxième lui rua dessus et l’attrapa fermement, par derrière. Elle lui décocha des coups de tête désespérés qui lui cassèrent le nez et déchaussa certaines de ses dents. Le troisième approcha, sortant un couteau long rouillé et tâché de sang, puant le poisson plus ou moins frais. Quelque chose vint se planter dans sa tempe et s’y enfonça. Il s’affala sur le quai sans un son. Elle profita de la surprise de son compatriote pour se dégager et lui mettre un coup de coude dans les côtes. Elle entendit un sifflement dans l’air, puis sentit le corps du marin s’effondrer sur elle. Elle le repoussa dans un cri pour contempler le carreau qui traversait sa gorge.

Constantine s’avança sur le quai, un air déçu sur le visage.

- Moi qui te trouvais douée au corps à corps…
- Pas assez pour trois marins bien bâtis, manifestement.

Il y eut un bref silence, que seul les gémissements du premier marin interrompaient jusqu’à ce que Constantine lui enfonce manuellement un carreau dans le cœur avant de tous les récupérer et les nettoyer.

- Merci.
- Hu ?
- De m’avoir aidée…
- C’est rien, j’aurais dut me douter que venir ici en tant que femme désarmée était dangereux.

Elle voulut lui répondre qu’elle n’était pas une de ces filles qui se faisait enlever sans résistance, mais c’était difficile à prouver, après ce qui venait de se passer. Elle se posta droit en face de lui.

- Et pourquoi je suis là, en fait ?

Elle l’observa de près, ses yeux gris étaient hypnotisant, et, pour une fois, il ne sentait pas l’alcool fermenté.

- Ca fait encore une dette.
- Quoi ?
- Tu me dois quelque chose, je viens de te sauver la vie.
- Effectivement, mais je te rappelle que je ne coucherais pas avec quelqu’un qui n’est pas avec moi.
- Qu’à cela ne tienne.
- Non non, tu ne deviendras pas mon copain pour seulement une nuit.
- Et si je le devenais pour plus ?
- Comment ça ?
- Pour plus qu’une nuit, pour plus que le plumard et pour plus que t’enseigner des trucs ? Je veux dire, genre pour essayer quoi.

Elle resta bouche bée, c’était une déclaration de plus in-conventionnelles, mais c’était la plus belle qu’on lui ait faite. Elle se colla contre l’exorciste et l’enlaça. Elle sentit les bras de Constantine se refermer sur son dos et l’étreindre. Elle ferma les yeux. Constantine lança alors un vague « Quelle classe, Constantine, t’assures. » et elle éclata de rire en l’étreignant à son tour. Elle n’avait jamais été aussi heureuse de sa vie. Ils restèrent debout, l’un contre l’autre, presque une heure entière.

- Et maintenant, on couche ensemble ?
- T’es incorrigible, hein ?
- Faut croire…Alors on fait ça chez qui ?
- Ma maison confortable ou la milice viendra me chercher ou une cabane en forêt que personne n’a jamais vu…le choix n’est pas évident.
- La maison de mon ex-femme, donc.

Et ils retournèrent en ville rapidement presque jusqu’aux portes de celles ci afin de rejoindre la demeure de Sasha. Epuisé, il tira deux couvertures sur le sol et s’allongea, utilisant un coussin de fauteuil comme oreiller. Vicky s’allongea à ses côtés, tête et main sur son torse. Sa présence compensait vingt fois de devoir dormir sur des dalles irrégulières et glaciales.

- Si je t’ai laissé le lit c’est justement pour…
- C’est parce qu’il est trop petit pour deux personnes. Tu n’as même pas passé une seule nuit avec cette femme ?
- J’aime mon travail.
- Et ce soir ?
- Je me concentre sur ta formation…

Elle sourit et se pelotonna contre lui. Il avait toujours détesté dormir, encore plus avec quelqu’un. Même les chiens n’osaient plus l’approcher, pendant ses missions nocturnes. Mais là, il trouvait ça agréable. Il ne voulait pas aller plus loin, contrairement à ce qu’il avait cru. Il ne voulait pas non plus la repousser. Il voulait juste la savoir avec lui. Il l’enlaça également et ferma les yeux, attendant le sommeil en profitant au mieux d’Elle.

Vicky écouta le cœur de Constantine, puis son souffle devenir profond, signe qu’il dormait. Au milieu de la nuit, elle fut réveillée par ses mouvements. Il semblait cauchemarder, et de manière plutôt horrifique. Elle passa sa main sur sa joue, le fixant. Il semblait beaucoup plus paisible et délicat, endormit. La caresse le réveilla, d’instinct il porta la main à son coutelas près du lit, puis ouvrit les yeux. Il reposa l’arme et lui sourit. Cela la surpris, mais elle ne le fit pas remarquer.

- Ca va ?
- Rien de plus dangereux que quelques souvenirs, t’en fais pas.
- D’accord…

Elle allait se recoucher contre lui, mais il se redressa en se frottant les yeux. Il lui adressa un vague sourire qui avait l’air de vouloir dire « Tiens, t’es encore là ? » puis passa une main dans ses cheveux pales.

- Ou tu vas ?
- Nulle part. Je vais aller bosser…ou traîner en ville, on verra.
- Mais…tu as dut dormir quatre heures grand maximum…
- Je sais, mais tu peux encore dormir, toi.

Il lui caressa la joue avec affection, la fixant dans les yeux.

- Je veux t’aider, je veux que tu m’apprennes. Dit-elle, soudainement réveillée comme si elle sortait d’une demi journée de repos.
- Oh, tu sais, c’est assez barbant et il faudrait t’expliquer pas mal de trucs…ça n’entre pas vraiment dans ta formation.
- Ca m’intéresse, affirma-t-elle avec un sourire.
- Je vais aller fouiller tout mes vieux bouquins en cherchant des allusions, plus que vagues, à un démon…c’est chiant.
- Je m’en fiche.

Elle lui adressa un sourire radieux, et Constantine comprit qu’il allait devoir travailler avec son apprentie, maintenant. Non pas que ça lui déplaise, mais il allait mettre du temps à s’y habituer, voilà tout. Il lui fit signe, enfila sa cape pourpre, ramassa ses armes et lui ouvrit la porte. Elle enfila rapidement sa tenue de la veille et sortit, l’embrassant au passage. Une merveilleuse journée s’annonçait.


Constantine accéléra le pas. Pourquoi n’était-elle pas au bar, comme convenu ? Bien qu’elle sache se défendre seule, et qu’une femme, de manière générale, n’est jamais à l’heure, il était inquiet. Une sorte de pressentiment désagréable qui grandissait au fur et à mesure qu’il remontait la rue. La journée était belle, nuageuse sans être froide. Il n’y avait aucune raison que quelque chose la gâche, tentait-il de se raisonner.

Puis il aperçu l’attroupement devant la demeure de sa chère et tendre. Deux miliciens encadraient une foule bruyante et remuante. L’exorciste couru les dernières mètres qui le séparaient de la maison, bouscula les civils afin de se retrouver face au corps sans vie de Vicky, baignant dans son sang, sur les pavés de la ville. Il tomba à genoux, ne pouvant détacher son regard du cadavre. Un silence de mort était tombé, la foule l’observait, gênée et triste pour lui. Des larmes coulèrent silencieusement le long des joues de Constantine, laissant des marques bien nettes parmi la crasse qui recouvrait son visage, suite à sa dernière mission. Pas un seul sanglot, pas un seul murmure, pas une seule supplication. Juste les larmes.

Deux heures plus tard, un officier arrivait, pour constater les faits, régler la paperasse administrative pour la mairie et trouver un coin ou jeter le corps. Constantine lui indiqua ses exigences quand à l’enterrement, au monument funéraire qu’il souhaitait faire ériger, et les détails de la cérémonie. Il ne s’y rendit pas, mais paya le double de ce qui était convenu, pour qu’on plante de rares fleurs du Sud sur la tombe. Les fleurs préférées de Vicky. Ce fut fait. Constantine avait de son côté commencer à se préparer pour partir. Traquer les assassins et leur faire payer. Il se rendit une dernière fois à la tombe et contempla la pluie qui faisait luire l’énorme monceau de pierre. Puis, ne pouvant contenir sa haine et sa tristesse, il poussa un hurlement en agrippant la roche.





Constantine se réveilla, en sueur et scruta sa cabane plongée dans l’obscurité. Il voulut se lever mais déjà il entendait les voix dans sa tête qui se moquait. Il resta donc allongé, espérant se rendormir. C’était peine perdue. Il se redressa et se dirigea vers une des nombreuses bibliothèques pleine à craquer de parchemins et de livres anciens. Il constata qu’il avait du mal à souffler et dut s’appuyer contre l’étagère pour ne pas tomber, pris de vertiges. La douleur, de faim et du manque d’alcool, le cueillit brutalement. Il sentit son cœur s’affoler. Tout devenait trouble. Il s’efforça de tirer un épais livre noir sans aucun titre sur la couverture. Il se laissa tomber, assis sur les fesses, et caressa l’ouvrage sans oser l’ouvrir. Une larme tomba sur la couverture, puis une autre. Puis Constantine fut pris d’une quinte de toux et sa tête bascula violemment en avant. Les ténèbres. Il entendit un bruit lointain, Vanilius venant le chercher, sans doute. Et en effet, il se sentit tiré dans les ténèbres. Il s’accrocha à son livre de plus belle avant de complètement perdre connaissance.

Alliage avait crié le nom de l’exorciste, de surprise, le voyant allonger dans le foutoir qu’était devenu sa cabane. Il posa deux doigts sur la gorge du mourant. Il y avait quelque chose, irrégulier et faible, mais bel et bien présent. Il saisit Constantine par un pied et le traîna jusqu’à sa monture. Il le hissa sur sa monture et partit vers l’infirmerie la plus proche. Même s’il devait en mourir, Constantine payerait ses dettes.
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MessageSujet: Re: Vicky   Vicky Icon_minitime1Mer 15 Déc - 3:32



Constantine contemplait, silencieux, la mer calme et sombre qui s’étendait à perte de vue. Adossé à un lourd poteau de bois qui servait de lampadaire, en extrémité de quai, il tapotait sa canne de métal en rythme sur son épaule, l’esprit dans le passé.

Une année. Cela faisait une année que sa compagne était morte. La seule femme qu’il n’avait jamais aimé en vingt cinq ans, la seule personne à qui il avait porté de l’affection. Il n’avait jamais trouvé de sens à donner à sa vie, les buts habituels de l’espèce humaine ne l’intéressaient pas, fortune, travail, gloire ou famille, il s’en moquait. Il passait son temps à le tuer, buvant encore et toujours, tout au long de la journée, afin d’accélérer le temps qui passe. Il était trop lâche pour mettre fin à ses jours et trop fainéant pour chercher un vrai passe temps, il avait donc choisit de mettre à profit ce que le temple dans lequel il avait grandi lui avait appris afin de gagner de quoi survivre. Et il avait attendu ainsi, des années, attendu sa mort, attendu un but, attendu une chose dont il n’avait pas la moindre idée.

Elle lui était alors apparue, un matin froid. Un matin que Constantine n’oublierait jamais. Il avait la gueule de bois, elle était belle. Il avait froid, elle était drôle. Il la voulait, elle le charmait. Il s’était revu presque tous les jours, pendant un mois avant qu’enfin l’exorciste comprenne que c’était l’amour qui hantait son âme et occupait son cœur. Ils avaient alors vécu une idylle douce et paisible, ils passaient leurs journées ensemble, à ne rien faire, la plupart du temps. Puis, un matin, inquiet de son absence, il avait traversé la ville jusqu’à chez elle, espérant la rencontrer en chemin. Il la retrouva, allongée devant sa demeure, entourées de civils choqués et de miliciens anxieux. Assassinée. Constantine avait dépensé toutes ses économies dans l’enterrement de sa douce, plus perdu que jamais il errait dans le cimetière, comme si elle allait sortir de terre et revenir lui prendre la main.

Puis était venue la colère, froide et implacable. Le meurtrier n’était qu’un bandit, un voleur à la tire, qui avait du la blesser mortellement pour pouvoir s’emparer de son or. L’homme a souffert, des jours durant. Puis Constantine a sombré dans la folie, il se disait hanté par le fantôme de sa compagne qui venait lui rappeler tous ses crimes et son impuissance à la ramener à la vie. On l’avait emmené dans une infirmerie ou il s’était fait soigner des mois durant pour schizophrénie et paranoïa. Il ne passait pas une journée sans qu’il ne repense à elle, et se rende compte à quel point son existence n’avait plus d’intérêt sans elle. Une fois de plus, il aurait voulu s’enfoncer son arme dans le cœur, ou s’égorger, ou se jeter dans la mer, une pierre au pied. Mais il en était incapable.

Brièvement, la lune perça à travers les nuages sombres, éclairant la mer, lui renvoyant son reflet. Un homme seul, triste et sombre qui sous des airs de mendiants et d’ivrognes cachait une vie en dérive. Le chaos à l’état pur. Il ne savait pas d’ou il partait, ni ou il allait, encore moins comment ou pourquoi, il vivait l’instant présent dans l’ennui. Il avait l’impression d’avoir cinquante ans. Cette année sans Elle lui avait déchiré l’âme et usé l’esprit. Lentement il se redressa, abandonnant sa canne, suspendue au poteau de bois, et prit la route de Sarosa. Ignorant le froid et la fatigue, il atteignit rapidement le cimetière privé ou il avait fait enterré sa douce. Au milieu des stèles blanches il y avait un véritable tombeau, sombre et luisant, entouré de centaines de fleurs très rares, venues du Sud, que les jardiniers s’efforçaient à entretenir. L’exorciste passa ses doigts sur le monument, silencieux. Sans sanglots, les larmes se mirent à couler sur ses joues crasseuses, tandis que des bribes de souvenirs heureux dansaient devant ses yeux. Il crispa sa main sur la pierre, comme pour saisir quelque chose. Il resta debout, à moitié recroquevillé sur le tombeau, plusieurs heures. Lentement, il dégaina son poignard et le plaça sous son menton, tremblant. Il fixait la roche, forçant son corps à commettre ce que son esprit refusait. Après plusieurs minutes, il finit par lâcher l’arme dont le bruit retentit en écho dans la nuit. Que pouvait-il faire, il se refusait à vivre mais ne pouvait mourir.

Rien ne le retenait, il était libre, comme il l’avait toujours été, et pourtant il ne pouvait pas se résoudre à mourir, malgré toute sa volonté de la rejoindre et d’abréger ses souffrances morales qui lui saignaient l’âme à vif. Une douleur bien plus insupportable que n’importe quel torture physique, et les Dieux savent s’il s’y connaissait sur le sujet. Un corbeau prit son envol, sur un arbre non loin, comme s’il avait attendu que Constantine se résigne à vivre.

Le mercenaire prit la flasque à sa ceinture et la bu cul sec, comme si l’alcool était un remède à l’amour. Une fois de plus, il caressa le monument mortuaire, comme s’il s’agissait de sa douce.

- Est-ce que j’ai vraiment tout foiré jusqu’au bout ?

La pensée lui a échappé, et son murmure disparaît dans l’obscurité silencieuse. Mais la question se répète en écho dans sa tête. Pourquoi tout ce qu’il entreprend doit forcément finir dans le sang ? Pourquoi ne peut-il pas mener une vie simple, comme presque tout le monde ? Pourquoi cela devait-il tomber sur lui ? Une fois de plus, il sent la colère monter en lui, prenant le pas sur la tristesse et la mélancolie. Il voudrait pouvoir tomber sur le Dieu responsable de ça et lui mettre une droite en travers du visage. Après tout, qui sont-ils pour décider du sort d’un être humain ? Et si en fait, ils ne dirigeaient rien ? Et s’ils n’étaient même pas des Dieux ? Et si tout était fruit du hasard, et qu’il était juste malchanceux ?

Cela ne le conforte pas plus, le résultat est le même, il est malheureux. L’aube pointe doucement, sous les nombreux nuages qui recouvrent le ciel de Vesperae. Il ramasse son arme et la range, caresse une dernière fois la stèle et retourne à Trigorn. Il a la gueule de bois, elle était belle. Il a froid, elle était drôle. Il la veut, elle est morte.
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MessageSujet: Re: Vicky   Vicky Icon_minitime1Mer 15 Déc - 3:33

Constantine observa les alentours ; il y avait de la neige partout dans le petit cimetière et la tombe qu’il entretenait régulièrement en était couverte. Il avança, ses pas résonnant en échos, et grinçant dans la neige. De grands coups de bras, il nettoya le tombeau et caressa, comme à son habitude le nom de celle qu’il avait aimé, comme pour communiquer avec elle. Un grand sentiment de solitude l’emplit. Et soudain une voix féminine retentit derrière lui.

- Pourquoi es-tu encore ici ?

Il se tourna, lentement, découvrant Vicky, plus belle que jamais. Elle était pieds nus, dans la neige, une longue robe noire soulignant parfaitement ses formes légèrement bercée par le vent, tout comme sa chevelure sombre. Son teint pâle se fondait presque dans le blanc de la neige, et ses deux yeux étaient plongés dans ceux de son amant, mais ils étaient vides de toutes émotions, étrangement vides. Voyant qu’elle attendait une réponse, Constantine répondit, voulant se rapprocher d’elle, mais il était comme cloué sur place.

- Je…Je t’aime toujours, tu es la seule qui compte. Plus jamais je ne convoiterais d’autres femmes. Je me sacrifie en ta mémoire…je…
- Non.


La réponse était sèche et le coupa net dans son élan. Elle enchaîna.

- Tu ne sacrifies rien du tout, Constantine. Tu t’es remis à boire, sous prétexte de vouloir m’oublier, et tu fréquentes toujours des putains, sous prétexte que c’est humain…
- Mais je n’aimerais plus d’autres femmes…
- Non. Je suis la seule que tu aies aimé. Tu ne te prives pas d’en aimer d’autres, tu n’en es pas capable. Il n’y a pas de sacrifices. Tu veux te donner des prétextes pour te sentir comme un héros. Pire, tu crois en être un. Mais tu n’es qu’une ordure, qui m’a trompé et a brisé ses engagements, a provoqué ma mort et en a profité pour se sentir bon.

Il voulait répondre, que rien n’était vrai, qu’elle n’avait pas compris, mais son cœur battait la chamade, manquant des mesures. Il du s’agenouiller, une main sur la poitrine.

- Sens comme j’ai souffert de te voir, de l’autre monde, rompre toutes tes promesses, faire voler en éclats ma confiance en toi, et décrédibiliser tout l’amour que j’ai pour toi. Sens la torture que cela est pour moi, chaque jour.

A nouveau, il ne pouvait rien dire, il voyait des ombres danser devant ses yeux, son cœur allait de plus en plus vite, et sautait de plus en plus de battements. Il avait l’impression que l’on le lui pressait de manière très réfléchie, afin qu’il en souffre, dans tout son corps, sans que cela n’en finisse pour autant. Il resta au sol, plusieurs heures, à écouter Vicky lui réciter toutes ses fautes. Le nombre de verres qu’il avait bu, le nombre d’innocents qu’il avait blessé ou massacré, le nombre de femmes qu’il avait payé, et la peine qu’elle avait éprouvée. Puis enfin elle se tut.

La douleur, bien que toujours présente, semblait s’être atténuée aussi se redressa-t-il légèrement, pour contempler sa bien-aimée. Il réussit, entre deux gémissements, à souffler une phrase.

- J’avais prévu de te marier. Le jour de ton décès. Une bague, j’avais acheté une bague. Tu veux la voir ?

De sa main tremblante, il tira sèchement sur les dizaines de cordes qui pendaient à son cou, écartant des amulettes et des talismans pour saisir entre ses doigts un anneau d’or pur, finement ouvragé, avec un diamant au centre, sombre et luisant. A l’intérieur était gravé « Vicky ». Il tendit son bras, manquant de défaillir plusieurs fois, vers la femme.

Elle le regarda avec dédain, puis se mit à hurler, tandis que des nuages sombres s’amoncelaient dans le ciel.

- Qu’ai-je à faire de ta bague, Constantine ? Je n’ai plus de doigts ou la porter, par ta faute !

En quelques instants, le tissu se trempa de sang frais et une large plaie à sa gorge s’ouvrit tandis que ses doigts ornementés de bijoux tombaient au sol, disparaissant dans la neige, laissant le sang couleur doucement, tâchant de pourpre le blanc immaculé. Le bandit avait en effet tranché les doigts de Vicky, après l’avoir égorgée, pour s’enfuir avec les bijoux. En quelques secondes, la neige était rougie partout autour d’eux.

- Si tu avais été là, je ne serais pas morte. Si tu m’avais prouvé que tu m’aimais plus tôt, je ne serais pas morte. Si tu ne m’avais pas donné rendez vous, je ne serais pas morte. SI TU NE M’AVAIS PAS AIMÉE JE NE SERAIS PAS MORTE !

Soudain, de la neige rougie s’éleva un corps, dans une cape rouge. Il fixa Constantine de ses yeux verts. L’assassin. Lentement sa robe se déchira, au niveau du pectoraux droit, et des hanches. Là ou les deux carreaux qui avaient permit sa capture l’avait transpercé. De là, elle s’effondra totalement, révélant l’homme à nu, petit à petit sa peau tomba, comme pelée. La torture qu’il lui avait fait subir, des heures durant. Puis les orteils furent sectionnés un à un, puis les doigts, phalanges par phalanges, puis mains, pieds et pénis, ensuite avant bras et jambe, suivie des cuisses et des bras, enfin les oreilles et le nez. Tout ces bouts de chaires au sol se tortillaient sous le regard amusé de Vicky, et effrayé de l’exorciste. Les yeux de l’homme se crevèrent, percés de la lame invisible de son bourreau, puis finalement ses tripes se déversèrent dans un flot continu sur la neige avant que sa tête n’éclate en morceaux, sous la pression d’un immense marteau invisible. Quelques bouts éclaboussèrent le malheureux spectateur, tétanisé. Vicky reprit la parole.

- Savais-tu seulement qui était cet homme ? Non, bien sûr que non, le Grand Constantine est le seul à souffrir, il se fout de ce qu’il arrive aux autres. Cet homme avait une épouse et quatre enfants, il m’avait tué parce que j’avais résisté et dépouillé pour permettre de leur offrir des études. Deux jours plus tôt il avait volé de la nourriture, au marché. Il les aimait plus que tout. Il avait tué pour eux, pour qu’ils vivent. Mais toi, tu as tué pour la vie de qui, Constantine ?

Il ne savait que dire, son cerveau était tellement inondé d’images effrayantes et de souvenirs que la douleur à son cœur lui semblait dérisoire, à côté. Lentement les morceaux de l’Assassin se redressèrent, formant les corps des enfants et de l’épouse. Tous le pointaient du doigt en scandant qu’il était un meurtrier.

- Le premier enfant fut emporté par la maladie, deux jours plus tard, le second mourut de malnutrition, car sa mère s’était fait prendre à voler et avait du passer une nuit aux geôles de la milice. La pauvre femme devint folle et fracassa le troisième enfant, un bébé, contre le mur d’une demeure, avant d’aller se donner la mort dans la mer, des pierres accrochées aux chevilles.

Les silhouettes avaient disparues au fur et à mesure, et seul restait le quatrième enfant. Vicky reprit, de sa voix froide et colérique.

- Le dernier, tu sais ce qu’il est arrivé au dernier ? La même chose que toi, Constantine, chéri. Il a vu tout ça, son innocence a disparu à jamais. Comme toi, il a été reçu par des prêtres et comme toi il va être éduqué, 11 ans encore, dans un temple. Mais comme toi il nourrit chaque jour une haine envers l’homme qui a détruit sa famille. La seule différence, c’est que lui ne t’ôtera à personne, et qu’il ne répétera pas ce qu’il a subit sur des centaines, des milliers d’êtres. Il n’est pas assez arrogant, heureusement.

La silhouette de chaire s’approcha de lui, menaçante et ses mains molles et chaudes, trempées de sang lui étreignirent la gorge. L’exorciste se débattait, coup de poings, de pieds, le bruit flasque du coup, une gerbe de sang dans les airs, mais rien de plus. Constantine manquait d’air, il se sentait partir, mais l’emprise cessa et la silhouette refondit dans la neige souillée.

- Et maintenant, boucher, erreur de la nature, fou, assassin, ivrogne, traître, lâche, coureur, âme perdue, cœur de pierre, meurtrier, faible, Constantine ? Qu’attends-tu pour toi aussi te donner la mort, et nous épargner des années de sang supplémentaire, avant que le fils de cet homme ne te tue ?

Il était épuisé, tant physiquement que moralement, les larmes coulaient sur son visage, ses mains se crispaient sur sa poitrine, son corps était parcourus de spasmes et son esprit lui jouait des tours. Vicky lui cracha au visage puis se retourna tandis que des centaines d’âmes, toutes ses victimes, lui apparaissaient, des armes à la main, pour le ruer de coups. L’étau se resserra, il poussa un cri et se réveilla.

Dégoulinant du sueur froide, l’air hagard, il chercha dans la caserne, sa bien-aimée, en vain. Il lui fallu plusieurs minutes pour se remettre de ce qu’il avait vu. Il tira à sa gorge, les talismans et saisit entre ses doigts sa bague de fiançailles, la faisant rouler sur son pouce. Il le laissa pendre, se redressant et parcouru maladroitement la pièce jusqu’à son paquetage dont il tira une petite boite contenant plusieurs parchemins froissés. Il en tira un, la dernière lettre qu’il avait reçu d’Elle. Il n’y avait que trois mots qui lui réchauffèrent l’âme, comme un remède à son cauchemar. « Je t’aime ». Il contempla la phrase plusieurs minutes, puis la rangea en murmurant.

- Tu me manques.
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MessageSujet: Re: Vicky   Vicky Icon_minitime1Mer 15 Déc - 3:37

Arik sortit du temple, afin de profiter du soleil dans le jardin entourant l'édifice, même si une partie de celui ci avait été aménagé en cimetière, il n'était jamais morbide d'y errer. Contrairement à celui de Gathol, celui ci était éternellement beau, quel que soit le temps. Presque enchanteresque, il faut dire que les tombes étaient somptueuses et très bien entretenues, la plupart des gens y étant enterré venaient de familles bourgeoises. Jamais de mauvaises herbes, jamais de stèles fendues ou profanées. Le prêtre marqua une pause, fermant les yeux afin de profiter des derniers rayons du soleil qui lui chauffaient la peau agréablement. Parfaitement détendu, il rouvrit les yeux et reprit sa promenade, repérant une silhouette à la cape rouge, parmi les monuments de pierre. Il n'aimait pas spécialement l'individu, même s'il avait su se rendre utile et lui avait sauvé sa place dans les ordres par le passé, il restait un incorrigible ivrogne qui répandait le sang et les blasphèmes partout avec lui. Tiraillé par la présence de l'exorciste, il se força à aller à sa rencontre. Il se racla la gorge et retira le capuchon de sa robe, révélant son crâne dégarnit et ornementé d'une cicatrice en forme de L.


- Qu'est ce que vous faites ici, Constantine ?

Ce dernier se retourna rapidement. Il ressemblait, comme chaque fois qu'il le voyait, plus à un mendiant qu'à un homme au service des Dieux. Ses luxueux habits souillés, son nez cassé, ses traits tirés, ses cheveux sales et son air triste mal dissimulé derrière de la froideur, tout cela inspira à la foi au prêtre de la pitié et du mépris. L'exorciste s'empressa de ranger une de ses amulettes sous sa chemise avant de répondre.

- Je me disais...Si elle décidait de revenir des morts...ça c'est déjà vu, j'veux dire. Je me disais que ce serait idiot que je sois pas là pour l'accueillir...

Le prêtre n'avait jamais vraiment su ce qu'il était advenu de la jeune femme, mais connaissant son conjoint, il se doutait qu'il n'était pas complètement blanc dans cette histoire et prenait toute la tristesse qu'il dégageait comme de la culpabilité sincère, ce qui restait très surprenant de la part d'un tel homme. Il se força à prendre une voix compatissante, comme celle qu'il emploie lors des funérailles, avant de poursuivre.

- Et qu'est ce qui vous fait croire qu'elle pourrait revenir ?

Malgré toutes ses précautions, il se rendit bien compte qu'il avait irrité l'exorciste. De la colère se lisait dans son regard

- Parce que je le mérite. Je n'ai tué personne, excepté le meurtrier de Vicky, depuis que c'est arrivé. J'ai du épargner bien une centaine de personnes. Je mérite d'être heureux non ? Et même si je le mérite pas, cent foutues vies valent bien la sienne.

Le prêtre se mordit la lèvre inférieure pour ne pas hurler au blasphème, comment un homme aussi mauvais pouvait-il se permettre de prétendre "épargner" des gens.

-Ce n'est pas du troc, Constantine, ce n'est pas en donnant cent vies que vous pourrez en acheter une, qui plus est ce n'est pas non plus une balance morale. Nous n'avons pas ce que nous méritons, nous avons ce que les Dieux nous donnent.

Un silence pesant tomba sur le jardin du temple. Pendant plusieurs minutes, qui parurent des heures, on entendit que le son du vent soufflant dans les arbres alentours.

- Nous verrons.

Répondit-il simplement, abandonnant le prêtre au beau milieu des sépultures.

***

Varel se redressa, tout son corps le faisait souffrir. Bien que sa vue soit presque complètement trouble, il constata qu'il était couvert de coupures plus ou moins profondes partout sur le corps, d'ailleurs il était nu dans une sorte de bassine pleine de son propre sang. La pièce n'était éclairée que par une petite fenêtre au plafond. Il était dans un sous sol, de toute évidence. Il entendait des aboiements de chiens. Après quelques secondes, il aperçu plus distinctement les environs dans la pénombre. Il y avait une autre personne, dans une bassine similaire, quelques mètres plus loin. Ce n'est qu'en voulant se redresser plus encore, qu'il constata qu'une de ses chevilles était enchainée au fond du récipient. Il tira à plusieurs reprises, malgré la douleur de tous ses muscles, à chaque mouvement, puis finalement se rendit à l'évidence et se laissa retomber. Que faisait-il là ? Qui était avec lui ? Qui le retenait ? Pourquoi ? Où ? Les questions n'apportaient que plus de questions mais jamais aucune réponse. Il mit plusieurs minutes à se calmer. Cherchant dans sa mémoire un élément de réponse.

Il avait été diner à Argelas, avec sa sœur et sa mère. Il avait du travailler deux fois plus pendant presque un mois pour que son patron accepte qu'il prenne congé. Son travail sur les docks de Trigorn était ingrat. Ils avaient mangés dans la bonne humeur, ce qui n'était pas arrivé depuis longtemps. Il se rappelait encore le rire cristallin de Mia, sa sœur, lorsqu'il s'était pris les pieds dans le noir, en voulant rejoindre la charrette de transport. Puis sa mère à son tour s'était effondrée à ses côtés. Le rire avait cessé, tandis que la femme se redressait prestement. Il avait tâtonné, trouvant ce qui semblait être une corde tendue en travers de la ruelle. Un jeu d'enfants, un genre de corde à sauter, avait-il d'abord songé. Mais il y avait eut les cris. Sa mère était à nouveau tombée au sol, une flèche en travers de la cuisse, hurlant de douleur. Il s'était précipité vers la silhouette de Mia, la plaquant au sol avec lui. Puis il lui avait désigné l'extrémité de la ruelle, tandis qu'il se levait face à la direction opposée, les mains en évidence, au niveau du visage. Il avait dit que c'était une erreur, puis que s'il s'agissait d'un vol il pouvait fournir sa bourse, contre la sécurité de sa mère. Une autre flèche, un carreau, en fait, lui avait transpercé les côtes, le faisant s'écrouler de douleur. Puis des pas, le choc, le trou noir.

Immédiatement il se redressa, fébrile, cherchant une troisième bassine des yeux, en vain. Il espérait que sa sœur s'en soit sortie saine et sauve, mais une grande part de lui craignait que sa mère n'ait succombé sur place et que sa sœur soit la femme à ses côtés. Aussi se mit-il à hurler, agitant ses chaines, souffrant le martyr, en vain. Cependant un grincement de porte se fit entendre et une silhouette s'éclairant d'une torche traversa la pièce, ouvrant sur son passage plusieurs volets qui laissèrent filtrer plus de lumière. Immédiatement il jeta un œil sur l'autre victime et reconnu les cheveux sombres de sa mère. Il fut soulagé un bref instant.

- Qu'est ce que vous voulez ?

La silhouette resta silencieuse, se dirigeant vers l'autre bassine. De toute évidence, il était vêtu de manière sombre, à l'exception d'une large cape rouge. De temps à autre, les flammes dansantes révélaient des cheveux blancs encadrant un visage sale et fatigué. Ses yeux gris brillant, comme des menaces silencieuses. Soudain elle prit la parole, une voix d'homme, froide, sèche et parfaitement calme.

- Je crains que votre mère ne soit moins forte que vous. Elle est âgée, il faut bien le reconnaitre...et toutes ses coupures semblent avoir du mal à cicatriser. Et si on l'aidait ?

La silhouette déposa un objet brillant, une masse peut être, contre la bassine et s'empara d'une bouteille à proximité. Son esprit réfléchissait à toute vitesse.

- Je suppose que je dois faire quelque chose en échange ?

Encore une fois, un long silence. Il reprend.

- Je peux essayer d'amasser de l'argent, je peux vous offrir ma demeure, mes services même ! Je peux...

- Ramener votre sœur.

Il reste un moment silencieux.

- Non.

-Dommage.

Répond simplement la silhouette, semblant s'apprêter à partir.

-Ce n'est pas que je ne veux pas ! C'est que je ne peux pas ! C'est la vérité ! Lors de l'attaque je lui ai fait gagner du temps, en me rendant, de façon à ce qu'elle puisse fuir. Elle est sans doute rentrée à Proncilia mais... Je ne peux pas l'affirmer.

A nouveau, un long silence. Il se sent idiot, il aurait très bien pu donner un autre nom de ville, pour gagner du temps. Pourquoi avait-il été franc, d'un bout à l'autre ? Enfin son ravisseur reprend la parole.

- Vous avez été coopératif. Je vais aidez votre mère...d'abord on va désinfecter tout ça à l'alcool.

Et de larges gestes du bras, la silhouette verse le contenu de la bouteille sur le corps dans la bassine. La femme se met à hurler et à s'agiter, chaque coupure se mettant à la lancer. Varel tente à nouveau de se lever, oubliant son entrave. L'individu reprend la parole, plus fort, pour couvrir les cris et les pleurs.

- A présent, il faut cicatriser tout ça. L'un des moyens le plus efficace, c'est le feu. Vous voulez voir ?

Et, joignant la geste à la parole, il lance la torche sur la femme qui, instantanément, prend feu et se met à hurler comme jamais. A nouveau, le prisonnier tente de forcer son entrave, à plusieurs reprises, frappant et hurlant, ne pouvant détacher ses yeux du brasier. Une odeur infâme de viande grillée et de Whisky s'élève lentement, tandis que les cris se font de plus en plus implorants. Il se sent un haut-le-cœur et crache aux pieds du récipient, puis se met à hurler, ivre de rage.

- Ce n'était pas ce qui était convenu ! Nous avions un accord ! Vous m'entendez, ordure ? Détachez moi que je vous flambe comme un porc, moi aussi !

Pendant de longues secondes qui lui paraissent des heures, la seule réponse qu'il a sont les cris d'agonie. Puis enfin la voix froide s'élève à nouveau.

- J'avais un accord, moi aussi, il y a longtemps. Mais votre famille, ou plus précisément votre père, a décidé de rompre cet accord. Je ne fais que vous rendre la pareille, voyons.

La réponse est comme un coup de marteau et il manque de basculer de son récipient. Cet homme a vraisemblablement tué son père, et à présent il a tué la mère. Lui va sans doute y passer aussi, tant qu'à sa sœur, ce n'est qu'une question de temps. Qu'est ce qui peut motiver une telle rancune ?

- Quel genre d'accord ?

Il ne se rend même pas compte avoir posé la question à voix haute, son regard toujours captivé par les flammes. Les cris ont cessés et l'odeur n'en est que plus atroce. Il ravale sa salive. Il doit gagner du temps.

- Il vous a doublé sur un vol ? Ou a essayé de vous trahir ? Il faisait ça pour pouvoir payer ses taxes, vous savez, c'était un homme bon...

En une fraction de secondes, la silhouette a fondu sur lui. Disparu le calme inquiétant et les mises en scène intimidantes, l'homme est en colère. Un poing s'abat sur son visage, lui heurtant la pommette, la brisant sans doute, tandis que sous la puissance du coup, toute sa tête se heurte au rebord du récipient dans lequel il est coincé. Sonné, il regarde son agresseur. Il a l'air d'un clochard et sent fort le Whisky, ses habits pourtant luxueux à l'origine sont tâchés ou troués et son visage tout entier est tordu par la colère.

- Est ce qu'un homme bon tue une femme innocente ?

Ce n'est pas une question, c'est un véritable rugissement, Varel n'a même pas le temps de comprendre la question qu'on l'empoigne sèchement à la gorge. Leurs visages sont à quelques centimètres seulement.

- As-tu la moindre idée de ce que ça fait de perdre tout ce qui nous est cher ? Non, et ton père non plus malheureusement. J'aurais du vous tuer avant lui. Qu'il souffre comme j'ai souffert. Mais je compte bien rattraper cette erreur. Je vais t'achever, puis je trouverais ta sœur..Mia, c'est ça ? Et elle, qui aura tout perdu à son tour, je la ferais hurler jusqu'à ce que son dernier litre de sang ne quitte son corps.

Constantine relâche enfin son prisonnier, le laissant reprendre l'air qui lui fait tant défaut. Il récupère sa canne et se met à frapper de grands coups dans le corps calcinés, encore enflammé par endroits, de l'épouse du meurtrier. Les os craquent, la fumée s'élève, l'odeur de cendre se répand. Il doit se défouler, sinon il sera trop agressif avec sa prochaine victime et ne le fera pas souffrir autant qu'il le mérite.
- Vous avez perdu la raison...

- Et comment !

Gronde l'exorciste, abandonnant le cadavre noirci pour renverser du pied la bassine de la victime. Il lui assène un coup de canne, lui brisant une rotule, puis un autre au visage, pour le sonner. Enfin il se calme, prenant de profondes respirations, tout en se dirigeant vers la porte.

- Tu sais pourquoi les chiens sont les meilleurs amis de l'homme ?

Aucune réponse. Seulement l'halètement du prisonnier et le crépitement des dernières braises du cadavre. A vrai dire Constantine lui même ne la connait pas, et s'en moque bien, au final. D'un coup de canne il ouvre des cages rangées là, les une après les autres, libérant différents chiens, de toute évidence affamés voir même pour certains peut être enragés. Attirée tant par l'odeur de la chaire grillée que par celle du sang, ils entrent les un après les autres dans la petite cave. Veral se met à implorer, à supplier, en vain, la porte se referme tandis que les bêtes, s'approchent, inexorablement.

L'exorciste reste dos à la porte quelques instants, jusqu'à entendre les premiers hurlements de douleurs, les bruits de viande déchiquetées. Puis remonte l'escalier qui mène dans la pièce principale de la demeure désaffectée. De manière presque gracieuse, la tristesse prend le pas sur la haine. Il n'est pas triste parce qu'il a fait, même s'il sait qu'il devrait l'être. Ni même parce qu'il s'est encore laissé aller à ses élans de colère, mais il regrette l'absence de Vicky, sa femme. En quelques secondes seulement, le tueur glacial, impassible, presque avide de souffrance, est devenu un simple homme désespéré. Comme à son habitude, il tripote la bague, l'alliance, pendue à son cou parmi ses talismans. Il revoit encore et toujours les même scènes, comme si sa mémoire n'était qu'un théâtre sordide ou l'on joue sans fin. Demain il ira sur la tombe. Puis il se mettra à traquer la fille du meurtrier, de son meurtrier. Cela ne lui apportait rien, et il en était conscient. Il savait que tuer quelqu'un ne ramenait pas un mort, ni n'apaisait sa disparition. Mais quelque chose en lui, une sorte de jalousie perverse, voulait que tous ceux qui avaient contribués à sa douleur souffrent. Comme s'il y avait un équilibre à maintenir. Comme si c'était nécessaire. Parfois il a l'impression d'être fou. Il est une véritable tombe, inébranlable au demeurant, lorsqu'il est en public. Mais à peine les regards tournés il devient un homme déchiré et tourmenté. Puis, lorsque l'occasion se présente, il devient un véritable bourreau qui n'a plus aucun principe ni limite.
Il boit une rasade d'alcool à sa flasque, et sort du bâtiment et traverse les rues presque désertes de quartiers pauvres de Trigorn. Il ne peut pas se permettre d'être attrapé maintenant. Quoi qu'il advienne après, il doit d'abord finir ce qu'il a commencé et exterminer toute trace de l'existence de l'assassin de Vicky, afin de pouvoir peut être l'oublier ou mieux, la ramener. Pour se faire il ira à Proncilia, traquera et sacrifiera Mia, huit ans.

Au même moment, quelque part à Proncilia, une petite fille, roulée en boule dans ses couvertures, blottie contre son doudou, dans son lit pleure encore et encore, depuis bientôt deux jours, seule dans la demeure de sa mère. Elle pleure parce qu'elle ne sait pas quoi faire, elle n'a pratiquement pas d'amis, ses parents ne voulaient pas qu'elle traine à l'extérieur trop souvent, n'a plus de famille ni d'endroit ou aller ou de choses à faire. Elle n'a plus aucun but à son existence. Elle est paniquée mais se réconforte dans cette seule idée; Bientôt quelqu'un viendra l'achever, et enfin, elle pourra revoir sa famille, si elle est sage. Les gens pas sages ne se font pas emmener par Vanilius près des autres. Ils restent morts pour toujours. Alors, pour être sûr de ne pas faire de bêtise, elle reste dans son lit, comme quand elle est punie, à attendre l'absolution.

***

Constantine frappa à la porte de la luxueuse demeure de Trigorn, dont le jardin semblait à l'abandon et les carreaux opaques tant ils étaient sales. Cette dernière s'entrouvrit laissant voir un visage de vieillard, presque complètement chauve et aux traits tirés. L'homme n'avait pas l'air ravi de voir l'exorciste, personne n'était jamais vraiment heureux de le voir, ses visites étaient presque toujours porteuse de mauvaises nouvelles, ou attiraient les ennuis. Cependant, un jour par année, le vieillard tolérait la compagnie du milicien, sans aller jusqu'à l'apprécier, cette visite annuelle lui remontait le moral, en des temps ou il en avait bien besoin.

- Kaleb n'est plus là ?

La voix froide et sèche habituelle de l'exorciste avait été remplacée par un ton plus doux et compatissant, pas plus sympathique pour autant, mais on sentait un effort sincère de la part de l'asocial. Sieben lui adressa un faible sourire, puis ouvrit complètement la porte, l'invitant à entrer.

- Non, Pierrot et Méléna non plus. J'ai du les congédier.

- Ils renâclaient à la tâche ?

Interrogea l'hôte, sincèrement surpris, tout en prenant ses aises dans un large fauteuil à côté duquel une bouteille de Whisky et un verre propre l'attendait, sur une table basse. Une fois de plus, Sieben le gratifia d'un sourire triste tout en lui servant à boire.

- Non, bien au contraire, ils ont acceptés de travailler avec un salaire réduit de moitié pendant plusieurs mois. Ils ne m'ont quitté il n'y a que quelques semaines à peine.

- Vous manquez d'or ? Vous auriez du me le dire, vous savez que le mien ne me sert jamais complètement.

Le vieillard bu une gorgée de son propre verre, qu'il avait au par avant rempli de vin. A la légère grimace qu'il fit, Constantine compris que là aussi, il se serrait la ceinture, renonçant à l'importer d'Argelas, se contentant d'un vin plus mauvais. Puis il hocha négativement la tête, en avalant, avant de reprendre la parole, s'asseyant à son tour dans un fauteuil.

- Non...je n'ai qu'à faire quelques économies ça et là...de toute façon je pense que je vais vendre la maison, elle est bien trop grande pour moi et mon épouse, à présent. Peut être pourriez vous me trouver une petite demeure dans votre village ? La proximité de la campagne me ferait le plus grand bien, j'en suis sûr.

L'exorciste ne répondit rien, buvant son verre. Le vieux Sieben n'avait pas eut beaucoup de chance, il avait travaillé des années durant afin de pouvoir s'offrir cette demeure, pour lui et ses trois enfants. Le premier était mort d'une longue maladie, la peste probablement, le second s'était enrôlé dans l'insurrection et avait périt durant le siège de la ville tant qu'à la dernière, Vicky, elle était morte assassinée dans la rue, pour avoir voulu se défendre d'un voleur. A présent il était seul avec son épouse. Le silence s'éternisa, puis, son verre vide, il fut bien forcé de répondre.

- Bien sûr, mais vous devriez rester ici. Je vais vous laissez mes économies, vous pourrez engager de nouveaux employés de maison pour votre jardin, votre ménage, la cuisine...

Sieben abandonna son verre sur l'accoudoir du fauteuil pour poser sa main sur le bras de son hôte, lui adressant enfin un sourire sincère.

- Je sais que vous faites ça par culpabilité, pas parce vous êtes bon. Mais il ne sera pas dit que Sieben a profité d'un homme, même dans nos circonstances. Pardonnez moi si je peux sembler impoli, mais je crois que vous en avez assez fait, pour notre famille.

La dernière phrase avait été prononcée de manière bien plus sèche, et son visage s'était durci, sa main s'était retirée, ce qui rendit l'atmosphère encore plus lourde qu'elle ne l'était déjà. Tout ce qui avait été dit était vrai, l'exorciste avait promis, peu après la mort de Vicky, que sa famille ne manquerait jamais de rien. Il ne les avait rencontré qu'une fois avant cela, et cela n'avait duré que quelques minutes, au détour d'une ruelle. Il avait poliment décliner une invitation et avait prétendu avoir à faire. Puis, Sieben était venu à Sarosa, deux ans au par avant, jour pour jour, cela aurait du être l'anniversaire de sa fille. Il s'était présenté à Constantine, qui, il faut bien l'admettre, n'allait pas bien non plus. Il venait de passer plusieurs mois à divaguer chez lui et avait manquer de mourir de faim et de soif. Aussi, il accepta l'invitation de son ex-futur beau père et se rendit avec lui dans leur demeure. Ensemble ils avaient passé la journée à s'échanger des anecdotes sur Vicky et même si elle avait été très importante dans la vie des deux hommes, ils restaient très stoïques. Se refusant à exhiber leurs émotions à l'autre. Puis ils s'étaient quittés en se disant "A l'année prochaine". Entre temps, le milicien envoyait un peu de sa solde régulièrement à Sieben qu'il savait dans une situation délicate et parce que ça lui paraissait nécessaire, pour honorer la mémoire de son aimée. Et d'une certaine manière, un lien s'était tissé entre les deux hommes, sans vraiment qu'ils ne s'en rendent compte.

Le vieillard se racla la gorge, ramenant son invité au présent et lui resservit un verre. Il savait qu'il faudrait au moins une bouteille, avant que celui ci ne daigne discuter comme n'importe qui.

- Et votre femme ?

Il fit non de la tête, terminant sa gorgée de vin, avant de répondre.

- Elle ne veut toujours pas entendre parler de vous. Ne lui en voulez pas, ce n'est pas contre vous spécialement...c'est juste qu'elle vous tient pour responsable de diverses choses. Vous avez été le sujet de beaucoup de disputes entre elle et ma fille.

Il marqua une pause, hésitant à continuer, termina son verre d'une traite puis reprit à voix basse.

- Elle ne veut pas que je vous en parle, mais elle voulait que Vicky épouse un noble de Trigorn. Cela nous aurait aidé, financièrement mais vous connaissez ma fille, elle voulait choisir elle même...et vous êtes arrivé. Et il faut avouer qu'avant de vous rencontrez on pensait qu'elle mentait, afin d'avoir un prétexte pour fuir ce mariage.

Constantine fut surpris, tant par la sincérité du vieil home à son égard que par ce qu'il venait lui dévoiler et, tandis que son hôte remplissait à nouveau les verres avant de poursuivre, il prit la parole d'une voix encore plus compatissante qu'il l'aurait voulu.

- J'ignorais tout cela. Elle ne m'en a jamais parlé, sinon vous vous doutez bien que je me serais retiré de cette affaire et...

Sieben rit de bon cœur, lui tendant son verre.

- Oh non. Vous dites ça pour être gentil, encore une fois...Bah ! De toute façon j'ai toujours voulu son bonheur...je suis content qu'elle ait tenu tête à sa mère. Surtout vu ce qui est arrivé ensuite...

A nouveau, il s'assombrit en songeant à la mort de sa fille. Il en était venu à croire qu'il avait été maudit des dieux, tant le sort semblait s'acharner sur ses enfants. A nouveau il y eut un silence entrecoupé par le son des verres heurtant la table.

- Et vous, Constantine, comment allez-vous ?

Le milicien répondit sobrement son traditionnel "je fais aller", avant de reprendre une gorgée, espérant que cela suffirait à changer le sujet de la discussion.

- Vous répondez toujours cela. Répondez moi sincèrement, ne serait-ce qu'une fois. Voyez ça comme une faveur que je vous demande. A chaque fois vous hochez la tête en écoutant ce que je vous dis, vous buvez quelques verres, vous vous contentez de politesse et de réponse courte. J'en viens parfois à me demander si cela vous affecte vraiment.

Piquer au vif, l'exorciste se redressa dans son fauteuil afin de se rapprocher, inspira profondément et répondit, sur une voix qu'il voulait monocorde mais qui laissa tout de même transparaitre une tristesse sincère et même un peu de colère, sur la fin.

- Votre fille était la meilleure chose ou personne qui me soit arrivée. Et, sa disparition m'a affectée, bien plus que vous. Il ne se passe pas une journée sans que je pense à elle, il m'est même arrivé d'avoir songé à me donner la mort, tant son absence me pèse. Croyez bien que tout comme vous, ce jour de l'an m'est particulièrement pénible et je suis vraiment heureux d'être invité ici chaque année, afin de surmonter cela. Alors n'osez plus jamais sous entendre que je ne suis pas affecté par tout cela. C'est même la seule chose qui m'ait affectée depuis près de vingt ans.

- Je ne voulais pas remettre en cause vos sentiments pour ma fille. Si je me suis montré désobligeant, j'en suis sincèrement désolé.

Il agrémenta son discours d'un sourire chaleureux et sincère, puis reprit une gorgée de vin avant de poursuivre.

- Donc, en toute sincérité a présent, comment allez-vous ?

Constantine le fixa pendant plusieurs secondes, puis soupira profondément avant de répondre.

- Je suis malheureux.

Le vieillard acquiesça de la tête, lui faisant comprendre qu'il était dans la même situation, bu une nouvelle gorgée et reprit.

- Moi aussi...mais, qu'étiez vous, avant de connaitre ma fille ?

- J'ignorais simplement que je l'étais.

Le milicien accompagna sa réponse d'un crispement de ses mains sur les accoudoirs du fauteuil, de toute évidence peiné. Puis il termina son verre d'une traite.

- Sauf votre respect, je préfère qu'on s'en tienne aux anecdotes sur votre fille. Tout comme vous, je n'aime pas spécialement parler de moi, surtout de choses personnelles.

Sieben acquiesça de la tête, le resservant. Et la journée s'écoula ainsi. Il évoqua la jeunesse de sa fille, allant de ses premiers pas jusqu'à son adolescence, tandis que de son côté Constantine lui parlait de tous les moments qu'il avait partagé avec elle, de leurs projets inachevés et de tout ce qui la concernait de près ou de loin.

- Je songe de plus en plus fréquemment à faire revenir votre fille. Par la nécromancie, ou une autre pratique similaire. Peut être en échange d'autres vies. Je ne sais pas encore.

Le vieillard frappa son accoudoir avec force, tremblant de colère.

- C'est hors de question ! C'était la volonté des Dieux, et aucun maléfice ne la changera ! Je refuse qu'on souille l'âme de ma petite Vicky.
Sieben était un fervent croyant en la volonté divine ou la destinée, tandis que son invité s'y refusait. Il voyait les dieux comme des putains, à qui l'on pouvait tout acheter, d'une manière ou d'une autre. L'ambiance devenant gênante, une fois de plus, le jeune exorciste termina son verre et s'en alla, sans rien ajouter. C'était la deuxième fois qu'on s'opposait à son projet, et pourtant...il était déjà trop tard et bientôt il sacrifierait la petite Mia pour ramener son aimée, et être heureux à nouveau. En quoi était-ce si fou que ça, d'aspirer au bonheur ?

***

La petite fille se cramponna plus fort encore à son doudou quand son nouvel ami la porta hors de la carriole qui les avait ramené à Trigorn. Elle ne l'aimait pas. C'était un type méchant et froid, sale et puant, mais il savait ou était sa famille, alors elle avait accepté de le suivre. Ensemble, ils remontèrent plusieurs rues avant de rejoindre ce qui semblait être une cave. A l'entrée de celle ci il y avait des cages vides, et il régnait une étrange odeur, comme si on avait fait griller de la viande marinée dans de l'alcool. A l'intérieur, il y avait des bassines les une sur les autres, dans un coin, et au milieu un coffre. L'homme la pressa à l'intérieur, tandis qu'elle se sentait de plus en plus triste. On lui avait mentit, sa famille n'était pas là et en plus, elle avait désobéit et suivit un inconnu. Elle ne les reverrait jamais. En quelques secondes seulement, elle se mit à pleurer à chaudes larmes, se laissant tomber sur les fesses, près du coffre. Constantine, agacé, la frappa de sa canne afin de l'assommer, puis la bâillonna et la plaça dans le coffre, parmi les restes calcinés de sa mère, les quelques morceaux pas trop abimés du cadavre en décomposition avancée de son père et les os rongés de son frère. Il referma celui là avec un vieux cadenas et quitta la cave. Il avait passé près d'une semaine à chercher un mage, prêtre ou nécromant qui serait capable d'exécuter un tel procédé. La plupart des interrogés l'avaient pris pour un fou, ou pour un tueur en série. Mais finalement, il en avait trouvé un qui avait accepté, contre une somme importante d'or. Dans quelques heures, jours tout au plus, il allait enfin être heureux.
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MessageSujet: Re: Vicky   Vicky Icon_minitime1Mer 15 Déc - 3:53

Je souris. Je dois avoir l'air idiot, à moitié assis dans mon lit, le bras droit complètement endolorie sous ce corps parfait. Son corps. Le sourire aux lèvres alors qu'elle ne fait que dormir, et pourtant, je ne saurais l'expliquer, mais sa seule présence suffit à rendre tout instant parfait, même celui-ci, ou mon bras me fait un mal de chien. L'aboutissement de deux ans de travail, de souffrances et d'autres choses sur lesquelles dorénavant je veux tourner la page. Tout ça pour une femme, me diraient les gens, incrédules, et peut être un peu admiratif. Mais ils ne comprennent pas qu'elle n'est pas n'importe quelle femme, comme moi-même, je l'ignorais il y a seulement quelques années. J'aurais passé dix ans, vingt, cinquante même pour la revoir. Tant pour ce qu'elle est en tant qu'être humain que pour ce qu'elle représente à mes yeux; le bonheur. Ces si précieux instants ou tout semble dérisoire, ou rien n'est lus effrayant que l'absence de l'autre, ces moments durant lesquels le temps semble passer plus vite que jamais. Je la regarde; son demi sourire, mi-charmeur mi-arrogant, rendant ses lèvres encore lus désirables, son nez qui semble parfait, quoi qu'elle en dise, ses longs cheveux sombres qui contrastent avec sa peau presque aussi claire que les draps, la façon dont ses doigts s'agrippent à moi, comme si, elle aussi, jamais plus ne me quitterait ne serait ce qu'un instant. Elle remue légèrement tandis que ma main libre caresse sa joue, se blottissant d'avantage encore. A son annuaire brille la bague qui a pendu à mon cou ces deux dernières années, attendant son retour. Je n'ai qu'une envie, la serrer contre moi, mais je ne veux pas la réveiller, alors j'attends encore, souriant. A l'extérieur, l'aube se lève déjà, plusieurs heures se sont écoulées depuis que je suis levé, et pourtant, je ne me lasse pas de l'admirer. Elle bouge, s'étire, cligne des yeux, me sourit en me susurrant qu'elle m'aime.

Mes bras se referment sur le vide, me réveillant par la même occasion. Comme toujours, le retour à la réalité me fait l'effet d'un coup de poignard en plein cœur, et je jette sans grand espoir un regard aux alentours, comme si j'espérais qu'elle soit là, dans un coin. Petit à petit, tout se précise dans ma tête. J'ai échoué. Il n'y a pas même une semaine, j'étais si proche de la voir revenir. Puis une citoyenne m'avait vu rodé dans la demeure abandonnée, et, au vu de mon insigne, avait été se renseigner à Sarosa. Le soldat Jacob avait alors été envoyer sur place, afin d'enquêter, et avait découvert le coffre. A l'intérieur, Mia, mourante de faim, à un point tel qu'elle avait tenté de manger les morceaux de cadavres décomposés qui lui tenaient compagnie dans sa prison improvisée. Bien sûr, et en dépit de tous les soins qu'elle reçu par la suite, elle mourut quelques jours après. A mon grand soulagement, on ne chercha jamais à savoir qui était le milicien qui avait été vu en premier sur les lieux. La liche que j'avais engagée avait accepté un dédommagement conséquent, presque autant que si elle avait fait son travail, en échange de son silence. On aurait pu dire que tout s'était bien passé. Et pourtant. A présent, ramener Vicky à la vie me parait impossible. Il faudrait utiliser des moyens bien plus hasardeux, dépenser des fortunes, trouver des dizaines, si ce n'est des centaines de victimes, avant de parvenir à un résultat. Je ne pourrais pas la ramener, en prison, ou pire encore, mort. Aussi devais-je rester discret et renoncer définitivement à cette folie. Le hasard fit que le vieux Sieben, père de Vicky, était décédé la nuit même ou je ramenais la fillette. D'ailleurs, les obsèques auront lieux dans quelques heures. Je n'irais pas. Sa fille, si tant est qu'elle puisse connaitre mes actes d'une façon ou d'une autre, ne m'en tiendra pas rigueur. Elle comprendra. Je crois. J'espère.

A l'heure actuelle ma plus grosse angoisse est de perdre l'opportunité de la revoir. C'est tout ce qu'il me reste; L'espoir. Je n'ai jamais aimé ça; "le premier pas vers la déception", comme disait un ancien collègue. Même si je n'ai plus rien à perdre. Le pire est derrière moi. Je crois. J'espère.


"Une femme, voila ce qu'il te faudrait". Ces mots, ceux de mon nouveau supérieur, Kilis, résonnent encore dans ma tête. Je l'avais et effectivement, c'est tout ce qu'il me fallait. A présent, je suis comme condamné à la solitude. Pourtant, je ne suis pas un romantique, les histoires d'âme sœur m'ont toujours inspirés que le mépris...Mais il faut me faire une raison, personne ne pourra la remplacer. J'ai commis une erreur. La pire qui soit. Une faille dans l'armure de solitude que je m'étais bâti. Les ignorants, voila les véritables bien heureux. Et, plus le temps passe, plus j'ai l'impression de perdre la raison. Il y a cette voix, dans ma tête. Sa voix, à elle. Je sais que ça n'est pas elle, et pourtant, j'ai envie d'y croire.


- Qu'est-ce que tu fais ?

Me demande-t-elle, tandis que je m'efforce de ne plus penser à toute cette histoire. Au début je ne réponds rien, j'essaye de l'ignorer. Mais elle recommence, encore et encore, comme une enfant, toujours plus fort. Jusqu'à ce que j'abandonne.

- Je te fuis.

Je parle, tout seul, dans le vide. Heureusement, je suis en "patrouille", ce qui signifie que j'essaye de faire une sieste dans la caserne presque déserte et que personne ne peut m'entendre. Je me sens assez mal comme ça, au point que je doute de pouvoir le cacher à un éventuel spectateur de la scène.

- Pourquoi ? Tu n'aimes pas te souvenir de tous ces bons moments ? Tu n'aimes pas te souvenir de moi ? Je croyais que tu m'aimais ?

Elle sait trouver les mots, manipuler mes réponses, structurer ses phrases de telle manière que je me sens coupable. Encore une fois, je ne veux pas répondre, mais je ne peux pas.

-Si.

Ma voix se casse, tant pis pour la suite de ma phrase. J'ai la gorge sèche, je bois une rasade de Whisky, ce qui n'arrange rien à ma confusion.

- Alors pourquoi ?

Reprend la voix, innocente.

- Parce qu'il faut que je t'oublie. Je ne veux plus souffrir.

J'ai des sueurs froides, je tremble, je ferme les yeux, respire profondément, essayant de me calmer. La voix reprend, et plus elle parle, plus je la revois, comme si elle était allongée à mes côtés, comme dans mes rêves.

- Tu sais, tu aurais pu me ramener, plusieurs fois même. Mais tu ne l'as pas fait. Tu es trop faible, pour ça, pas vrai ? Tu sais très bien que tu pourrais me rejoindre, il te suffirait de te tuer. Je n'attend que toi, là bas. Mais si tu tardes trop...qui sait ce qu'il adviendra.

Sans que je comprenne vraiment ce qu'il m'arrive, je me met à croire ses paroles, la logique la plus élémentaire m'a quittée. Je ne veux plus qu'une chose, la retrouver, d'une façon ou d'une autre. Je sors le poignard, dans ma botte et le plaque sur ma gorge, tremblant, m'entaillant à plusieurs reprises légèrement.

- Allez, sois un homme, pour une fois. Enlever la vie des autres c'est facile, c'est autre chose quand c'est la sienne, hein ?

Je déglutis. Et si rien n'était vrai ? Si je me retrouvais simplement mort. S'il n'y avait pas moyen de la rejoindre, après ? Alors je m'empêcherais définitivement de la ramener. Mais si elle a raison, je risque également de la rater. Je ne sais plus qui croire, je me sens mal. La voix continue de m'encourager, toujours plus douce, plus attirante. Au pire, même si je meurs, sans la revoir...ce serait la fin de toutes ses souffrances. Ca ne peut pas être mauvais...j'hésite encore. Ma mort ne fera souffrir personne. Je n'ai plus de famille, pas d'amis, seulement quelques collègues collants. J'ai accompli tout ce que je devais accomplir, je tourne en rond, maintenant, cherchant à récupérer ce qui appartient au passé. Peut-être est-ce la seule solution ?

Quelqu'un entre, la voix se tait, je cache l'arme précipitamment sous mes draps. C'est une nouvelle recrue, on se salue brièvement. Il ne veut pas se mettre à dos un supérieur, il a raison. De mon autre main, je cache du mieux que je peux les entailles sous mon menton.


- Z'allez bien ? Z'êtes tout pâle.

Qu'est-ce que je peux lui répondre ? Que la femme que j'aime me hante et que j'allais me donner la mort ? Non sûrement pas.

- J'ai du un peu forcer sur le Whisky, rien de grave.

Il a l'air dubitatif, ma réputation me précède sans doute. Puis finalement, il récupère quelques affaires et s'en va. A peine la porte refermée, la voix revient, presque suppliante.

- Allez Constantine. Rejoins moi. S'il te plait. J'ai besoin de toi ici. Tu me manques tellement.

Je pense la même chose. J'ai l'impression d'être de l'autre côté d'un miroir pervers, ou celle que je désire me renvoie tout ce que j'éprouve pour elle. A nouveau, je bois, terminant ma flasque, en renversant une bonne partie tant je tremble, l'autre main serrant toujours l'arme, sous les draps. La voix reprend, changeant d'approche.

- Je comprends tellement ce que tu ressens. Mais il n'en tient qu'à toi de changer ça. De redevenir heureux. Et tu le sais très bien, n'est-ce pas ?

A vrai dire, je ne suis plus sûr de rien, pas même de mon nom. Elle répète sans cesse cette dernière phrase. Je n'en peux plus, je lui hurle de se taire, je ne sais plus si je le fais vraiment, ou seulement dans ma tête. Puis enfin, le silence. Je relâche l'arme, me laissant tomber sur le lit, le souffle court. Qu'est-ce qu'il m'arrive ? Deux soldats, les types de garde, entrent en trombe à leur tour, l'air hagard, armes dégainées. J'ai donc vraiment hurlé. Finalement l'un des deux rengaine et s'approche de moi, portant une main à ma gorge ensanglantée. Encore une fois, on me demande si tout va bien. J'hésite un long moment. Si je réponds oui, je risque de passer pour un fou. Si je leur explique, je passe aussi pour un fou. Il insiste, me secouant légèrement. Il me croit en état de choc...et peut être que je le suis, d'ailleurs...depuis deux ans. Je finis par hocher doucement la tête. Il se recule, toujours méfiant.

- Vous voulez qu'on vous emmène à l'infirmerie ? Vous avez du sang à la gorge...et vous êtes tout pâle et transpirant, comme empoisonné.

- J'ai du mal à digérer quelque chose...peut être un surplus de Whisky. Et j'ai voulu me raser, je me suis coupé, ça arrive, quand on a trop bu.

Pour appuyer mes dires, je veux me relever, leur montrer que je vais bien, je vacille et manque de tomber, me rattrapant de justesse au soldat.

- Passez moi ma canne.

Un homme à canne, probablement soul, qui tient mal sur ses jambes, c'est normal, non ? Ils ont pas l'air convaincu. Le temps passe, et finalement, ils se décident à retourner à leurs postes après moult conseils. Dormez un peu, allez à l'infirmerie, faites quand même examiner votre gorge, et d'autres qui déjà m'échappent. Je vais enfin souffler un peu. Je m'assied sur le bord du lit, rengainant le poignard, prêt à reprendre ma sieste quand la voix s'élève à nouveau dans ma tête. Ca ne peut plus durer. Je me relève, traverse le village et atteint le pub. Je commande du Whisky, beaucoup de Whisky. Et pendant plusieurs heures, je bois, essayant de noyer la voix dans les méandres de l'ivresse. En vain. Je ressors de l'établissement et m'enfonce un peu dans la forêt, à l'abri des regards.

- Allez, rejoins moi. Tu me manques tellement. On sera réunis, pour toujours.

Je suis à genoux, ma canne m'a échappé des mains. Je crois bien que je pleure mais j'ai l'esprit vraiment embrouillé. Je m'entends résister, insulter la voix. J'ai l'impression que ça dure des heures, je suis vraiment mal, la voix bourdonne dans ma tête, j'ai l'impression qu'elle va exploser. J'ai déjà vécu tout ça une fois, seul dans ma cabane, il n'y a qu'un seul moyen de s'en défaire; obéir. Alors je reprends mon poignard et une fois de plus la porte à ma gorge. Tout est flou, j'ai vraiment trop bu, l'arme me tombe de la main plusieurs fois. Mais à chaque fois, docilement je la ramasse et me remet à hésiter. La voix se fait toujours plus douce et plus forte à la fois. Tant pis, même si je me trompe, au moins ce sera la dernière fois. Il n'y a plus rien à perdre. Je ferme les yeux, même comme ça j'ai l'impression que tout tourne, j'appuie avec l'arme mais je ne sens rien. L'alcool sans doute, ou alors la mort n'est pas si horrible qu'on l'imagine. Je m'entends tomber au sol, sans vraiment m'en rendre compte, je n'entends plus la voix. J'ai perdu la notion du temps mais petit à petit, je me sens partir.

On y est.

L'aboutissement final de 25 ans d'atrocités.

Le trou noir.


(Vous l'aurez remarqué si vous êtes arrivés jusque là; Sur celui ci y a une mise en forme, pour la bonne et simple raison que je l'avais mise directement dans le .doc (surtout parce qu'elle avait son importance, je trouve, sur la façon de lire le texte). Beaucoup, mine de rien, m'ont cassés les couilles concernant la fin de ce texte. Je dois avouer que même si je suis très fier de la forme, surtout sur la fin, le fond lui laisse clairement à désirer, mais je voulais éviter au maximum de faire appel à une magie quelconque pour clore l'histoire Vicky; D'une part pour pas faire tiquer la moitié de la communauté, de l'autre parce que finalement, une fin ouverte comme celle là permet toujours de la faire ressurgir plus tard si l'inspiration me revient, mais surtout parce que ça aurait été beaucoup trop facile et ça aurait marquer un véritable mur avec ce dont je parlais au tout début, et donc, c'était difficile de rester cohérent et fidèle à mes idées à la fois. ^^

Doivent être remerciés, en vrac; Karn (participation), Alliage (participation), Kilis (participation), tous ceux qui m'ont lu, ici ou ailleurs, plus encore ceux qui m'ont fait quelques commentaires, ig, mp, irl, privé ou sur le fofo même de SO, et bien évidemment: Missy, sans qui ces textes n'auraient jamais vu le jour.

Et arrêtez de me demander si Exo est mort ou pas, c'est justement tout l'intérêt de cette fin.)
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MessageSujet: Re: Vicky   Vicky Icon_minitime1Mer 15 Déc - 4:01

(Putain je me demandais si tu allais re-poster tout ces textes Smile J'avais déjà lu chaque texte à chaque fois mais j'dois avouer que le premier m'était sortie de la tête quand tu as sortie les 2 derniers x) Je relirais tout ça *_*)
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MessageSujet: Re: Vicky   Vicky Icon_minitime1Mer 15 Déc - 4:39

(Bah quand même, je me vois mal mettre tout ça sur ma description parce que ça va vraiment donner une image d'un Exo romantique ou j'sais pas quoi et surtout ça va faire chier tout le monde à lire. Donc oui, la centralisation était prévue. J'avais voulu le faire chez Nid', mais je croyais avoir "perdu" le premier, et surtout c'était fait un peu à l'arrache, et puis c'est pas la guilde d'Exo donc ça n'avait pas grand sens. Et en plus là y a les commentaires originaux xD)
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MessageSujet: Re: Vicky   Vicky Icon_minitime1Mer 15 Déc - 12:12

Exceptionnel, j'ai rarement pris autant de plaisir a lire des textes RP (sinon peut-être les différents textes des Nomades et ceux de Gorn Valim. Ah, et la capture de Tyroine, mais ca c'est parce que je l'ai joué :3)

Après ca change des quelques autres textes liés a Exo et surtout du Exo ig, mais ca reste excellent.
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MessageSujet: Re: Vicky   Vicky Icon_minitime1Mer 15 Déc - 14:34

Rekkar a écrit:

Après ca change des quelques autres textes liés a Exo et surtout du Exo ig, mais ca reste excellent.

Oui c'est justement tout l'intérêt des dits textes ^^

N'exagèrons rien, ceux de Gorn sont quand même plus que largement supérieur. Mais merci Very Happy
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MessageSujet: Re: Vicky   Vicky Icon_minitime1

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